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Symbiose | Moti
Soukaïna
Maison des Maintes Eaux
19 octobre 118
Cela faisait quatre jours que la jeune femme avait rejoint cette nouvelle planète. Dorénavant dryade, elle ne comprenait absolument rien au pouvoir lié à sa race. Pour ne pas l’accabler et la rassurer, car il n’est pas rare que les nouveaux arrivants sombrent dans un état dépressif ou au moins anxieux, les personnes des Maintes Eaux qui l’accompagnaient la rassuraient sur ce point. Il était normal de ne pas tout maîtriser dès son arrivée. Et puis, avec son caractère enjoué, débordant de questions en tout genre, personne ne s’inquiétait pour la jolie Soukaïna. Bientôt, elle aura tellement de connaissances dans son esprit qu’elle comprendra mieux le nouveau monde qui l’entoure. Elle devra rester sous mentorat pendant un moment, mais la nymphe désignée pour l’assister dans ses premiers pas, était non seulement sympathique, mais très optimiste. Un petit peu usée, également. La dryade était définitivement trop bavarde et devenait agaçante.
Même si elle prenait sur elle, Soukaïna peinait à ne pas parler de son symbiote. Elle était encore incapable de le décrire, de connaître sa hauteur, son envergure, mais elle avait sur le front un petit aperçu de l’arbre auquel elle était liée. Elle l’évoquait sans cesse et ne faisait que quémander que l’on organise une sortie pour qu’elle aille à sa rencontre, quand elle ne posait pas une multitude de questions sur un individu ailé qu’elle avait observé dans le ciel, par exemple. Ce n’était pas tant parce qu’elle était mignonne et candide que l’on s’arrangea avec les veilleurs pour permettre une telle sortie… Mais bien parce qu’elle était pénible, comme un môme incapable de gérer sa frustration.
Le matin du 19 octobre, son mentor lui apprit la bonne nouvelle. La nymphe s’était arrangée pour demander officiellement à un veilleur d’escorter dès que possible la nouvelle arrivante sur Ozéna. La jeune femme était chanceuse, elle avait reçu une réponse positive rapidement et ce n’était pas n’importe qui qui s’était dévoué pour l’accompagner en dehors des remparts, où se trouvait l’arbre de la jeune femme. Le prestige ! Un capitaine allait reléguer ses tâches quotidiennes pour permettre à la dryade de toucher son arbre. La nymphe espérait sincèrement que cela permettrait à la dryade de trouver un peu de calme, de préparer cette sortie avec sérieux, car ce monde est plein de dangers lorsque l’on n’y est pas préparé… Oh que oui, elle était tellement sérieuse qu’elle posa une avalanche de questions ! La matinée s’était déroulée beaucoup trop lentement aux yeux de son mentor qui devait subir ces assauts.
C’était limite si elle ne sautillait pas en parcourant la ville, à côté de la nymphe. Soukaïna fredonnait une chanson, trop heureuse pour se restreindre. Néanmoins, elle était un peu peinée de ne pouvoir la chanter, car les paroles s’étaient envolées de son esprit, elle n’avait plus que la mélodie en tête. Son mentor ne connaissait pas cette chanson, mais qu’importe, elle les accompagna jusqu’à se trouver aux pieds des remparts. Dansant d’un pied sur l’autre, un sourire beaucoup trop lumineux et excité sur le visage, la dryade écouta les derniers conseils de son mentor.
- Je ne peux pas te dire grand-chose de la hiérarchie des veilleurs, je ne les connais pas bien… Mais puisque les capitaines sont directement sous le commandant Koss, ce sont des personnes avec beaucoup de responsabilités… Tu m’écoutes Soukaïna ?
La bouche en forme de « o », elle venait de voir deux malakims rejoindre leur poste respectif en survolant les remparts. Qu’ils étaient gracieux et impressionnants ces êtres ailés ! Certains disaient qu’ils étaient des descendants des anges, enfin elle avait entendu ça parmi toutes les informations qu’elle avait retenu jusqu’ici. Son mentor claqua des doigts vers le visage de la dryade, pour la forcer à l’écouter.
- Tu ne peux pas papillonner de la sorte tout le temps, Souki !
Un peu honteuse d’être ainsi rabrouée sous les yeux des veilleurs et des passants, elle sentit ses épaules très légèrement se voûter vers l’avant. Heureusement, la nymphe avait utilisé ce petit surnom affectif, pour ne pas rendre sa remarque trop cinglante. En se promettant d’être plus attentive – pour combien de temps ? –, Soukaïna releva les yeux vers son mentor, pour écouter tous ces conseils sans être hallucinée par tout ce qui l’entoure.
- Tu seras donc avec un capitaine, qui a la gentillesse de t’accompagner rencontrer ton végétal. Ce serait bien que tu ne lui fasses pas perdre trop de temps, donc pas de détours, pas de questions dans tous les sens et pas de regard de chaton pour obtenir un caprice. C’est bien compris ?
La dryade frottait nonchalamment le bout de sa chaussure sur le sol, tandis qu’elle essayait d’amadouer la nymphe avec ce même regard de chaton. Cela ne fit que provoquer un rire chez son mentor, qui lui fit signe de la suivre.
- Tu es vraiment amusante dans ton genre… Bonjour ! Elle apostropha un veilleur au hasard, le premier à croiser leur chemin. La dryade était déçue de ne pas voir des ailes dans son dos, ni de pouvoir reconnaître en un coup d’œil sa race. Mademoiselle ici présente a reçu l’autorisation de sortir en compagnie du commandant Kilonzo pour aller rencontrer son symbiote, qui pousse en dehors des remparts.
Pour affirmer ses dires, la nymphe présenta le document officiel, daté, signé, approuvé. Avec ses grands yeux verts tendres, Souki papillonnait d’excitation. Le veilleur leur demanda de patienter, le temps qu’il aille faire passer le mot de leur arrivée à son commandant.
- Tu sais comment ça se passe la rencontre ? Est-ce que je vais entendre une voix dans ma tête ? Est-ce qu’en le touchant, je vais avoir des visions ou…
- Je n’en sais rien, je ne suis pas une dryade et quand bien même, d’un individu à l’autre, tant de choses sont différentes ici…
Pensive, le nez en l’air pour essayer de croiser une paire d’ailes de malakim et finalement vers l’horizon pour peut-être observer un métamorphe, elle attendit que son garde du corps vienne à sa rencontre. Son mentor lui avait indiqué qu’il est un élémentaire de terre et, un peu naïvement, elle s’attendait à rencontrer un bonhomme tout en boue.
Cela faisait quatre jours que la jeune femme avait rejoint cette nouvelle planète. Dorénavant dryade, elle ne comprenait absolument rien au pouvoir lié à sa race. Pour ne pas l’accabler et la rassurer, car il n’est pas rare que les nouveaux arrivants sombrent dans un état dépressif ou au moins anxieux, les personnes des Maintes Eaux qui l’accompagnaient la rassuraient sur ce point. Il était normal de ne pas tout maîtriser dès son arrivée. Et puis, avec son caractère enjoué, débordant de questions en tout genre, personne ne s’inquiétait pour la jolie Soukaïna. Bientôt, elle aura tellement de connaissances dans son esprit qu’elle comprendra mieux le nouveau monde qui l’entoure. Elle devra rester sous mentorat pendant un moment, mais la nymphe désignée pour l’assister dans ses premiers pas, était non seulement sympathique, mais très optimiste. Un petit peu usée, également. La dryade était définitivement trop bavarde et devenait agaçante.
Même si elle prenait sur elle, Soukaïna peinait à ne pas parler de son symbiote. Elle était encore incapable de le décrire, de connaître sa hauteur, son envergure, mais elle avait sur le front un petit aperçu de l’arbre auquel elle était liée. Elle l’évoquait sans cesse et ne faisait que quémander que l’on organise une sortie pour qu’elle aille à sa rencontre, quand elle ne posait pas une multitude de questions sur un individu ailé qu’elle avait observé dans le ciel, par exemple. Ce n’était pas tant parce qu’elle était mignonne et candide que l’on s’arrangea avec les veilleurs pour permettre une telle sortie… Mais bien parce qu’elle était pénible, comme un môme incapable de gérer sa frustration.
Le matin du 19 octobre, son mentor lui apprit la bonne nouvelle. La nymphe s’était arrangée pour demander officiellement à un veilleur d’escorter dès que possible la nouvelle arrivante sur Ozéna. La jeune femme était chanceuse, elle avait reçu une réponse positive rapidement et ce n’était pas n’importe qui qui s’était dévoué pour l’accompagner en dehors des remparts, où se trouvait l’arbre de la jeune femme. Le prestige ! Un capitaine allait reléguer ses tâches quotidiennes pour permettre à la dryade de toucher son arbre. La nymphe espérait sincèrement que cela permettrait à la dryade de trouver un peu de calme, de préparer cette sortie avec sérieux, car ce monde est plein de dangers lorsque l’on n’y est pas préparé… Oh que oui, elle était tellement sérieuse qu’elle posa une avalanche de questions ! La matinée s’était déroulée beaucoup trop lentement aux yeux de son mentor qui devait subir ces assauts.
C’était limite si elle ne sautillait pas en parcourant la ville, à côté de la nymphe. Soukaïna fredonnait une chanson, trop heureuse pour se restreindre. Néanmoins, elle était un peu peinée de ne pouvoir la chanter, car les paroles s’étaient envolées de son esprit, elle n’avait plus que la mélodie en tête. Son mentor ne connaissait pas cette chanson, mais qu’importe, elle les accompagna jusqu’à se trouver aux pieds des remparts. Dansant d’un pied sur l’autre, un sourire beaucoup trop lumineux et excité sur le visage, la dryade écouta les derniers conseils de son mentor.
- Je ne peux pas te dire grand-chose de la hiérarchie des veilleurs, je ne les connais pas bien… Mais puisque les capitaines sont directement sous le commandant Koss, ce sont des personnes avec beaucoup de responsabilités… Tu m’écoutes Soukaïna ?
La bouche en forme de « o », elle venait de voir deux malakims rejoindre leur poste respectif en survolant les remparts. Qu’ils étaient gracieux et impressionnants ces êtres ailés ! Certains disaient qu’ils étaient des descendants des anges, enfin elle avait entendu ça parmi toutes les informations qu’elle avait retenu jusqu’ici. Son mentor claqua des doigts vers le visage de la dryade, pour la forcer à l’écouter.
- Tu ne peux pas papillonner de la sorte tout le temps, Souki !
Un peu honteuse d’être ainsi rabrouée sous les yeux des veilleurs et des passants, elle sentit ses épaules très légèrement se voûter vers l’avant. Heureusement, la nymphe avait utilisé ce petit surnom affectif, pour ne pas rendre sa remarque trop cinglante. En se promettant d’être plus attentive – pour combien de temps ? –, Soukaïna releva les yeux vers son mentor, pour écouter tous ces conseils sans être hallucinée par tout ce qui l’entoure.
- Tu seras donc avec un capitaine, qui a la gentillesse de t’accompagner rencontrer ton végétal. Ce serait bien que tu ne lui fasses pas perdre trop de temps, donc pas de détours, pas de questions dans tous les sens et pas de regard de chaton pour obtenir un caprice. C’est bien compris ?
La dryade frottait nonchalamment le bout de sa chaussure sur le sol, tandis qu’elle essayait d’amadouer la nymphe avec ce même regard de chaton. Cela ne fit que provoquer un rire chez son mentor, qui lui fit signe de la suivre.
- Tu es vraiment amusante dans ton genre… Bonjour ! Elle apostropha un veilleur au hasard, le premier à croiser leur chemin. La dryade était déçue de ne pas voir des ailes dans son dos, ni de pouvoir reconnaître en un coup d’œil sa race. Mademoiselle ici présente a reçu l’autorisation de sortir en compagnie du commandant Kilonzo pour aller rencontrer son symbiote, qui pousse en dehors des remparts.
Pour affirmer ses dires, la nymphe présenta le document officiel, daté, signé, approuvé. Avec ses grands yeux verts tendres, Souki papillonnait d’excitation. Le veilleur leur demanda de patienter, le temps qu’il aille faire passer le mot de leur arrivée à son commandant.
- Je n’en sais rien, je ne suis pas une dryade et quand bien même, d’un individu à l’autre, tant de choses sont différentes ici…
Pensive, le nez en l’air pour essayer de croiser une paire d’ailes de malakim et finalement vers l’horizon pour peut-être observer un métamorphe, elle attendit que son garde du corps vienne à sa rencontre. Son mentor lui avait indiqué qu’il est un élémentaire de terre et, un peu naïvement, elle s’attendait à rencontrer un bonhomme tout en boue.
Moti Kilonzo
Maison du Ciel et du Souffle
Il lui a fallu trois jours. Juste trois jours pour l’identifier. Lui qui, depuis plusieurs années maintenant, passait tant de temps devant le Temple, à grappiller les quelques informations qu’on acceptait de lui donner sur les nouveaux arrivants… tout c’est passé si vite cette fois. Et c’était la bonne. Elle se fait appeler Soukaïna. Il l’a vue de loin, l’a salué furtivement ensuite, pile ce qu’il fallait pour qu’il reconnaisse les grains de beauté sur la paume de sa main droite.
D’ordinaire si stoïque, c’est un ouragan qui a déferlé en lui, à cet instant, et il s’est rapidement détourné pour partir. Zuri. Zuri est arrivée. Zuri est là. Il a songé à ça et ce n’est qu’après qu’il s’est souvenu de ce que l’un des gardiens lui a soufflé : une dryade amnésique, Soukaïna. Ça ne change pas grand-chose. Depuis tout ce temps il espérait qu’elle finisse par le suivre, sur Ozéna. Jamais il n’a songé à ce qui se passerait ensuite. Les années ont passé, sa certitude s’étiolait par moment avant de revenir, plus forte encore. Zuri était forte, elle avait hérité de sa mère, mais elle n’était certainement pas assez forte pour tenir l’empire Kilonzo toute seule, sans formation ni conseils, vu qu’elle n’a jamais voulu s’y intéresser.
Il était évident qu’elle viendrait, mais maintenant qu’elle est là… que faire ? Très rapidement, il se dit qu’il n’a pas à se dévoiler. Vu la façon dont ils se sont quittés, à quoi bon ? Pourquoi se précipiter pour tout lui dire ? Si elle retrouve la mémoire, il n’y gagnera probablement rien. Alors pourquoi ne pas profiter de la situation présente, au final ? Un nouveau monde, une nouvelle Zuri. Un nouveau Moti, aussi, bien qu’il refuse souvent de l’admettre. Il est capitaine Veilleur, il est élémentaire de Terre, cela change même le plus farouche des terriens. Sa fonction, d’ailleurs, peut lui être quelque peu utile… s’il n’a plus réellement discuté avec sa fille depuis des décennies, ne serait-ce pas l’occasion d’y remédier ?
C’est cette envie incongrue qui le pousse à jouer des coudes discrètement, lorsque le gardien avec lequel il est en contact lui apprend qu’elle réclame fortement à pouvoir sortir et entrer en contact avec son symbiote.
« Je vais m’en occuper.
- Mais…
- Il n’est pas nécessaire qu’un Veilleur quitte son poste pour ça. Et puis, cela me dégourdira les jambes. »
Il l’annonce le plus simplement possible, pour n’éveiller aucune suspicion et cela passe. Personne n’a vraiment de raison de l’en empêcher, ce ne serait pas la première fois qu’un Capitaine s’essaie à des besognes qui ne le concernent pas vraiment, simplement pour prendre un peu l’air au-delà des remparts.
La chose est donc actée avec le temple et le jour dit, il attend tranquillement dans son bureau, se doutant que le mentor de Soukaïna arrivera d’un instant à l’autre. Il s’affaire à remplir un peu de paperasse quand on vient finalement le chercher.
« Capitaine, il y a quelqu’un pour vous, avec une autorisation de sortie.
- Ah. Oui. »
L’autorisation est posée sur son bureau, le nom de Soukaïna y est distinctement visible. Il ne laisse rien transparaître, mais il attendait cet instant. Il prend sa hache qu’il range dans le système d’attache dans son dos et quitte son bureau. À l’extérieur des remparts, on n'est jamais trop prudent.
Il ne lui faut pas longtemps ensuite pour s’avancer face à un duo composé de la jeune dryade et de la nymphe qui l’accompagne. De toute sa hauteur il surplombe les deux femmes.
« Bonjour, je suis le capitaine Kilonzo. » Il leur fait à chacune un signe de la tête, alors que le Veilleur venu le chercher reprend sa position de garde. Moti s’attarde sur la jeune femme, qu’il peut pleinement observer, cette fois. Si tu la voyais, Safiya. Dans l’attitude, dans la forme des yeux, elle lui ressemble… c’est ce qui le frappe le plus, au-delà de la racine sur son front, trahissant sans mal la race que le portail a choisie pour elle. « Vous êtes donc la dryade que je vais escorter, c’est ça ? » Question rhétorique.
Puis, vers la nymphe : « Ne vous en faites pas, elle sera entre de bonnes mains. Nous vous ferons appeler à son retour, pour que vous veniez la chercher. » Car cela fait ne fait que quelques jours que la jeune femme a foulé le sol d’Ozéna, quoi qu’il se passe auprès de son symbiote, elle ne sera pas prête à y faire face complètement seule. Il ne sait d’ailleurs pas vraiment ce qu’elle sait encore, ni comment elle vit son arrivée, son amnésie ou sa condition de dryade. Et, chose qu’il a du mal à réaliser, il va avoir un long instant seul avec elle, plutôt que d’essayer d’avoir des bribes de réponse par d’autres, il pourra simplement… lui demander.
Lui parler.
Avant qu’elle le trahisse, quelle est la dernière fois qu’ils se sont parlés, seuls à seuls, sans que cela dégénère ? Sans qu’elle n’ait des phrases toutes prêtes à lui déverser, des piqûres de venin et des caprices de fille gâtée ? La dernière fois où ils se sont simplement posés, comme un père et sa fille, à discuter de tout et de rien, à apprendre l’un de l’autre ? La dernière fois où il a pu se faire une idée précise de la femme qu’elle devenait, de ses aspirations ou même de micro détails à mémoriser précieusement, pour les ressortir plus tard et lui faire plaisir. Son amitié avec untel, ce bijou qu’elle portait, ce voyage qu’elle imaginait… Il ne sait plus. Cela fait si longtemps. Un autre monde. Un autre temps.
Dans ses pensées, il a un temps d’arrêt avant de hocher la tête aux propos de la nymphe, qu’il n’a pas vraiment écouté. Cette dernière a quelques mots pour sa protégée avant de s’éloigner. C’est à lui de prendre le relai, maintenant. Sa cape épaisse sur les épaules, il sait qu’il peut paraître impressionnant… mais elle n’a pas l’air impressionnée. Plutôt curieuse.
Il la laissera parler quand elle voudra, en attendant…
« Avant que l’on parte, quelques consignes. Ici, dans Azamyr, vous êtes en sécurité. De l’autre côté des remparts, même si nous travaillons tous à ce que la zone la plus proche de la ville soit sécurisée, des dangers peuvent survenir. Sous toutes les formes. » Il marque un temps d’arrêt, pour être certain qu’elle assimile. « C’est pourquoi vous devez rester auprès de moi et m’écouter, d’accord ? »
Il se positionne ensuite à ses côtés et affiche le visage le plus apaisé qui soit. « Si vous êtes d’accord avec ça, tout se passera très bien pour la découverte de votre symbiote. On y va ? »
Il avance à son rythme à elle, de façon à ce qu’ils atteignent rapidement la grande porte, que des Veilleurs sont déjà en train d’ouvrir pour les laisser passer.
D’ordinaire si stoïque, c’est un ouragan qui a déferlé en lui, à cet instant, et il s’est rapidement détourné pour partir. Zuri. Zuri est arrivée. Zuri est là. Il a songé à ça et ce n’est qu’après qu’il s’est souvenu de ce que l’un des gardiens lui a soufflé : une dryade amnésique, Soukaïna. Ça ne change pas grand-chose. Depuis tout ce temps il espérait qu’elle finisse par le suivre, sur Ozéna. Jamais il n’a songé à ce qui se passerait ensuite. Les années ont passé, sa certitude s’étiolait par moment avant de revenir, plus forte encore. Zuri était forte, elle avait hérité de sa mère, mais elle n’était certainement pas assez forte pour tenir l’empire Kilonzo toute seule, sans formation ni conseils, vu qu’elle n’a jamais voulu s’y intéresser.
Il était évident qu’elle viendrait, mais maintenant qu’elle est là… que faire ? Très rapidement, il se dit qu’il n’a pas à se dévoiler. Vu la façon dont ils se sont quittés, à quoi bon ? Pourquoi se précipiter pour tout lui dire ? Si elle retrouve la mémoire, il n’y gagnera probablement rien. Alors pourquoi ne pas profiter de la situation présente, au final ? Un nouveau monde, une nouvelle Zuri. Un nouveau Moti, aussi, bien qu’il refuse souvent de l’admettre. Il est capitaine Veilleur, il est élémentaire de Terre, cela change même le plus farouche des terriens. Sa fonction, d’ailleurs, peut lui être quelque peu utile… s’il n’a plus réellement discuté avec sa fille depuis des décennies, ne serait-ce pas l’occasion d’y remédier ?
C’est cette envie incongrue qui le pousse à jouer des coudes discrètement, lorsque le gardien avec lequel il est en contact lui apprend qu’elle réclame fortement à pouvoir sortir et entrer en contact avec son symbiote.
« Je vais m’en occuper.
- Mais…
- Il n’est pas nécessaire qu’un Veilleur quitte son poste pour ça. Et puis, cela me dégourdira les jambes. »
Il l’annonce le plus simplement possible, pour n’éveiller aucune suspicion et cela passe. Personne n’a vraiment de raison de l’en empêcher, ce ne serait pas la première fois qu’un Capitaine s’essaie à des besognes qui ne le concernent pas vraiment, simplement pour prendre un peu l’air au-delà des remparts.
La chose est donc actée avec le temple et le jour dit, il attend tranquillement dans son bureau, se doutant que le mentor de Soukaïna arrivera d’un instant à l’autre. Il s’affaire à remplir un peu de paperasse quand on vient finalement le chercher.
« Capitaine, il y a quelqu’un pour vous, avec une autorisation de sortie.
- Ah. Oui. »
L’autorisation est posée sur son bureau, le nom de Soukaïna y est distinctement visible. Il ne laisse rien transparaître, mais il attendait cet instant. Il prend sa hache qu’il range dans le système d’attache dans son dos et quitte son bureau. À l’extérieur des remparts, on n'est jamais trop prudent.
Il ne lui faut pas longtemps ensuite pour s’avancer face à un duo composé de la jeune dryade et de la nymphe qui l’accompagne. De toute sa hauteur il surplombe les deux femmes.
« Bonjour, je suis le capitaine Kilonzo. » Il leur fait à chacune un signe de la tête, alors que le Veilleur venu le chercher reprend sa position de garde. Moti s’attarde sur la jeune femme, qu’il peut pleinement observer, cette fois. Si tu la voyais, Safiya. Dans l’attitude, dans la forme des yeux, elle lui ressemble… c’est ce qui le frappe le plus, au-delà de la racine sur son front, trahissant sans mal la race que le portail a choisie pour elle. « Vous êtes donc la dryade que je vais escorter, c’est ça ? » Question rhétorique.
Puis, vers la nymphe : « Ne vous en faites pas, elle sera entre de bonnes mains. Nous vous ferons appeler à son retour, pour que vous veniez la chercher. » Car cela fait ne fait que quelques jours que la jeune femme a foulé le sol d’Ozéna, quoi qu’il se passe auprès de son symbiote, elle ne sera pas prête à y faire face complètement seule. Il ne sait d’ailleurs pas vraiment ce qu’elle sait encore, ni comment elle vit son arrivée, son amnésie ou sa condition de dryade. Et, chose qu’il a du mal à réaliser, il va avoir un long instant seul avec elle, plutôt que d’essayer d’avoir des bribes de réponse par d’autres, il pourra simplement… lui demander.
Lui parler.
Avant qu’elle le trahisse, quelle est la dernière fois qu’ils se sont parlés, seuls à seuls, sans que cela dégénère ? Sans qu’elle n’ait des phrases toutes prêtes à lui déverser, des piqûres de venin et des caprices de fille gâtée ? La dernière fois où ils se sont simplement posés, comme un père et sa fille, à discuter de tout et de rien, à apprendre l’un de l’autre ? La dernière fois où il a pu se faire une idée précise de la femme qu’elle devenait, de ses aspirations ou même de micro détails à mémoriser précieusement, pour les ressortir plus tard et lui faire plaisir. Son amitié avec untel, ce bijou qu’elle portait, ce voyage qu’elle imaginait… Il ne sait plus. Cela fait si longtemps. Un autre monde. Un autre temps.
Dans ses pensées, il a un temps d’arrêt avant de hocher la tête aux propos de la nymphe, qu’il n’a pas vraiment écouté. Cette dernière a quelques mots pour sa protégée avant de s’éloigner. C’est à lui de prendre le relai, maintenant. Sa cape épaisse sur les épaules, il sait qu’il peut paraître impressionnant… mais elle n’a pas l’air impressionnée. Plutôt curieuse.
Il la laissera parler quand elle voudra, en attendant…
« Avant que l’on parte, quelques consignes. Ici, dans Azamyr, vous êtes en sécurité. De l’autre côté des remparts, même si nous travaillons tous à ce que la zone la plus proche de la ville soit sécurisée, des dangers peuvent survenir. Sous toutes les formes. » Il marque un temps d’arrêt, pour être certain qu’elle assimile. « C’est pourquoi vous devez rester auprès de moi et m’écouter, d’accord ? »
Il se positionne ensuite à ses côtés et affiche le visage le plus apaisé qui soit. « Si vous êtes d’accord avec ça, tout se passera très bien pour la découverte de votre symbiote. On y va ? »
Il avance à son rythme à elle, de façon à ce qu’ils atteignent rapidement la grande porte, que des Veilleurs sont déjà en train d’ouvrir pour les laisser passer.
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