PNJ : Leander:

Alors que la forêt dans laquelle ils s'étaient engagés devenait peu à peu un marécage fétide, le faucheur gardait néanmoins son entrain naturel. Certes, leur expédition ne débutait pas par le plus agréable des terrains, mais après tout, les ambitions de la Guilde des Explorateurs ne devaient pas s'arrêter à un si petit obstacle que leur confort personnel. De son habituel pas léger, il progressait avec moins de difficulté que certains de ses collègues, plus lourdement équipés, d'autant plus qu'il se laissait aller, de temps à autre, à franchir une portion particulièrement peu praticable du chemin à l'aide de ses pouvoirs, disparaissant dans une volute de fumée noire tachetée d'or pour réapparaître quelques mètres plus loin, les pieds – le plus souvent – fermement posés sur un rocher ou un tronc d'arbre renversé.


Faisant partie de ceux qui fermaient la marche, il ne put s'empêcher de remarquer qu'un de ses camarades eut la judicieuse idée de marquer leur passage sur certains des arbres de la forêt. Intrigué il s'approcha d'une des « œuvres » sylvestres, et leva un sourcil dubitatif en découvrant le résultat, qui n'était pas à la hauteur de ses attentes.

- "Je salue l'initiative à la fois pratique et ... artistique, j'imagine ? Mais je ne peux que déplorer le manque de goût qui vient la ternir. Dommage, je reste sur ma faim."


La progression se fit sans encombre, jusqu'à ce que vienne le moment fatidique, celui de la croisée des chemins. Les idées fusèrent, les arguments furent échangés en faveur de l'un ou de l'autre chemin, voire pour les deux en même temps.

- "Je serais d'avis à emprunter le chemin de gauche et de déterminer ce qui s'y trouve tant qu'aucun autre danger ne nous presse."

Il croisa les bras, et ajouta d'un air pensif.

- "Je ne pense pas non plus qu'il soit judicieux de se séparer aussi tôt sans y être contraints, mais si le besoin s'en présente, il faudra placer Archer et moi dans chacun des deux groupes..."

Leander fit un geste du bras en direction de son congénère faucheur, en lui adressant un grand sourire éclatant.

- "Non pas que je souhaite le moins du monde m'éloigner de ce beau brun ténébreux, mais si les choses prennent un cours funeste, il serait appréciable que nous puissions tout deux vous ramener vers un lieu de rassemblement que nous aurons préalablement..."

Son regard se perdit dans le vague en direction d'Archer, comme s'il fixait un point que lui seul pouvait voir, alors que ses mots s'éteignaient au beau milieu de sa phrase.

- "Par tous les Dieux, cette beauté... Cet éclat..." Il fit quelque pas en direction de l'archer extrêmement bien nommé, avant de tendre délicatement les doigts d'une main dans sa direction. "Cette couleur..."


Tout à coup, Leander disparut dans un petit torrent de fumée et se matérialisa ... A une dizaine de mètres derrière Archer. Sans plus prêter la moindre attention à la raison ou à celle de ses camarades qui pourraient bien essayer de le rappeler à la réalité, il fit quelques pas, les derniers qui le séparaient d'un arbre bien spécifique. À première vue, il ne différait pas bien de tous les autres qui se trouvaient dans cette sombre forêt, mais d'un interstice de son écorce semblait perler une substance d'un bleu si pur, si parfait, qu'il ne pouvait en détacher le regard, comme hypnotisé. Dans l'obscurité imposée par l'épaisse frondaison au dessus de leur tête, le liquide luisait telle l'unique étincelle de couleur et de beauté dans un désert grisâtre.


Mais le sol de cette forêt était aussi traître qu'elle était morne et terne. Fasciné par l'éclat azur presque magique de la perle inattendue, Leander ne prit plus garde à là où il posait les pieds, et sa botte s'enfonça d'une bonne vingtaine de centimètres dans la vase, dans un bruit répugnant. Décontenancé par ce qui venait de briser la magie de cet instant, il perdit l'équilibre et vint s'écraser, face la première, sur l'objet de sa contemplation.


Le contact du liquide sur ses lèvres acheva de mettre fin à ses rêveries, non pas par son goût délicieusement sucré, mais par un tout autre effet : il ressentit une brûlure plus vivace encore que celle causée par le plus puissant des alcools de sa distillatrice préférée. Pire encore, il s'infiltra entre ses lèvres, qui s'ouvraient sur un cri de surprise – et de douleur – et vint enflammer sa bouche tout aussi rapidement.


Tout penaud, les fesses dans la boue, il porta ses doigts sur ses lèvres endolories que le feu quittait déjà, aussi vite qu'il était arrivé. Outre un mince filet de sang qui s'échappait de son nez, sa peau ne présentait pas la moindre trace d'une quelconque réaction, et, comme si rien n'était jamais arrivé, il ne subsistait dans sa bouche ni la douceur du miel, ni la morsure de la flamme.

Résumé:

C’aurait pu être une balade tout à fait sympathique si seulement nous n’avions pas de la boue jusqu’aux chevilles et que l’odeur rance des herbes fermentées ne nous prenait pas autant à la gorge qu’aux narines. J’avançais silencieusement, sans avoir rien à dire à qui que ce soit. Je me contentais d’observer ce qui n’était pas forcément une mauvaise chose, j’avais passé des années à faire ça sans que cela ne me pose le moindre problème -c’est faux, cela m'avait grandement posé problème mais je n’avais guère eu le choix-. En tout cas, il s’avéra que les dessins douteux qui jalonnaient notre parcours commencèrent peu à peu à perdre en qualité et ce n’était en rien la faute de l’artiste. C’était un peu comme si la nature elle-même était en train de réparer ce qui avait été dégradé. “C’est une mauvaise idée” Songé-je. Tout comme ma venue dans ce groupe. Oh loin de moi l’idée de rendre les armes, j’étais bien déterminée à avancer coûte que coûte mais je devais bien admettre que par moment, je ne pouvais m’empêcher de me dire que Viktor avait raison. Enfin, c’était un peu tard pour les regrets. Je n’avais plus qu’à espérer que les points tiendraient jusqu’à ce qu’Uriah puisse leurredonner un petit coup de frais.

Après un court débat, il fut choisi d’un commun accord que nous empruntions le chemin de gauche. Celui là ou l’autre, ça se résumait à choisir entre la peste et le choléra. Aucun ne m’inspirait aucune confiance et j’étais certaine que peu importe l’endroit où nous irions, les problèmes auraient tôt fait de nous rattraper. Mais je suivi docilement le mouvement, réhaussant légèrement mon arc sur mon épaule comme si sa présence pouvait me protéger du bourbier dans lequel nous étions en train de foncer tête baissée.

Cet endroit aurait pu paraître avenant pour un aveugle avec un sac plastique sur la tête et quelque chose en moi me hurlait de faire demi tour. Pourtant, comme les autres, je m’engageais au milieu de la clairière pour y découvrir un spectacle lugubre. La boue avait été remplacée par des ossements -trop nombreux à mon goût-, le ciel s’était assombrit, à tel point que les premières gouttes de pluie étaient en train de tomber silencieusement sur le sol et les arbres étaient recouverts d’une étrange substance qui attisa ma curiosité. J’avançais jusqu’à une branche à ma hauteur et observait la matière d’aussi près qu’il était possible de le faire. Je la humais également, dans l’espoir d’en tirer quelques informations. J’étais loin d’avoir l’expérience des plus anciens d’entre-nous mais je pouvais toujours espérer servir à quelque chose.

- De la toile d'araignée qui ressemble pas à de la toile d'araignée. Annoncé-je sans grande conviction avant de retourner vers le groupe. - Je pense qu’il ne faut pas s’attarder. Même si on ne me demandait pas mon avis, je ne pouvais m’empêcher d’avoir l’impression d’être… Dans un garde-manger qui n’aurait pas été rempli depuis bien longtemps et en étant là, nous le remplissions

Résumé:

Le choix sera donc pour la clairière et son odeur de sang. Potentiellement du travail en plus si on ne fait pas attention à nous. Ce n’est pas comme si nous n’y étions pas préparé et puis je suis là. Indispensable, conscient de l’être, prêt à prouver que je le suis et à faire comprendre qu’on ne peut se passer de moi. Contrairement à d'autres. Je voulais pas relever ses bêtises sur les arbres, ça aurait été lui accorder plus d’importance qu’il n’en mérite mais maintenant que la nature elle-même nous indique que ce n’est pas une bonne idée je suis bien obligé de le garder à l'œil. Et dire qu’il était en pleine crise de panique quelques heures plus tôt. Au moins on peut pas lui retirer qu’il se remet vite. Avec un moral comme ça d’ici quelques jours il sera soit une grande force pour le groupe soit celui qu’on ne veut surtout pas voir car beaucoup trop joyeux pour la situation. S’il ne se fout pas dans une situation d'où on ne peut pas le sortir. Ouais, va falloir garder un oeil sur lui. Et notre petite vampyre à l’air décidée à s'acquitter de cette tâche, parfait. Un travail de moins. Et le silence soudain dans mon dos m’indique que du travail je vais en avoir.

Il a à peine fallu quelques secondes de pause pour que lui aussi se mette à faire des siennes. Je le perds des yeux un instant et je le retrouve la tête contre un arbre, un pied enfoncé dans la boue jusqu’à la cheville. Avec un soupir je le rejoins “T’es pas obligé de compenser les bêtises de l’autre sur les arbres. Et encore moins en les embrassant. T’as demandé leur permission avant ? Qui sait comment ils vont le prendre.” L’arbre sur lequel il s’est retrouvé ne semble pas indiquer quoi que ce soit de nocif, mon expérience horticole, clairement pas là où je brille le plus, m’indique qu’il ne s’agit que d’écorce mais un seul moyen d’en être sûr. J’attrape son menton du bout des doigts pour le forcer à me regarder, dans le même mouvement je me rapproche de lui, me plaçant à quelques centimètres à peine de son visage, étudiant rapidement de potentielles blessures. Nous sommes assez prêts pour que je puisse sentir mon propre souffle sur ses lèvres. “Y’as rien, pas de bisou magique pour toi.” Dans le même temps, je le relâche et m’écarte de lui en riant. Qu’est-ce qu’une fausse alerte peut être salvatrice.

Mais rapidement la situation me rattrape, la clairière s’étend devant nous avec tout son lot de problèmes. Pas de trace de bestioles mais des toiles d’araignées ou de quoi que ce soit qui n’indique rien de bon, et surtout des os par terre. J’attrape rapidement un foulard dans le fond de mon sac et me le noue autour du nez, si y’as quoi que ce soit de nocif dans l’air c’est pas ça qui va me protéger mais temps que je ne sais pas ce qui a eu raison d’eux on va éviter de prendre des risques. Comme on pouvait s’y attendre, le groupe se disperse rapidement, chacun partant vérifier les environs. Et vous, qu’est-ce que vous pouvez bien me dire sur l’endroit. Je suis soigneur, pas médecin, encore moins légiste, mais ça devrait être suffisant pour se donner une idée. Déjà, pas d’arme à proximité. Certaines ont pu disparaître avec le temps, je pense surtout à des choses en bois, mais une trace serait quand même restée. On devrait pouvoir écarter l’idée qu’ils se soient entretués. Pour le reste… Quelques traces de morsures et d’autres ont été rongés.

Après une dernière vérification je me relève et m’adresse aux personnes à proximité. “C’est très certainement d’origine animale. C’est pas mon domaine d’expertise d’examiner les morts mais les traces de morsures ne laissent pas beaucoup de place au doute. Y’en a aussi qui ont été rongés, ça je vais prendre le risque de m’avancer et dire que ça a été fait après la mort.” Ce qui voudrait dire que si on recoupe les info ça sent vraiment pas bon. “Je suis pas un expert, là aussi je vais m’avancer sans preuve concrète mais, s’ils ont été rongés après la mort ça peut vouloir dire qu’ils ont été mangés. Donc on est peut-être bien en plein milieu de la tanière ou du garde manger d’une bestiole.”

PNJ : Leander:

Leander était toujours dans un état quelque peu second quand Uriah vint brièvement « l'ausculter ». Il était présent sans l'être, comme s'il se remettait peu à peu d'un bref envoutement qui l'avait saisi l'espace d'un instant. Le souffle du flamboyant guérisseur chatouillant ses lèvres l'en extirpa mais malheureusement, cette fugace opportunité s'était envolée avant qu'il ne revienne pleinement à lui, et ce dernier s'éloignait déjà en riant.

- "Dommage... Tu viens de manquer le bisou magique le plus ardent de ta carrière de guérisseur..." lui adressa-t-il, la voix teintée d'un mélange de plaisanterie et de déception.


Le faucheur se releva, réajusta son armure et finit de s'arracher à cette étrange torpeur qui l'étreignait toujours légèrement. Il constata avec dépit que ses bottes et son armure auraient bien besoin d'un nettoyage après cette petite escapade, mais ne se laissa pas abattre par quelques traces de boue ; l'exploration n'était guère l'une des activités les plus propices à rester propre jusqu'à la fin de la journée. Laissant ce petit épisode derrière lui, du moins tant que ses conséquences ne viendraient pas le rattraper, il se remit en route dans la direction choisie par le groupe.


En arrivant dans la clairière, il était sûr d'une chose : l'endroit ne respirait pas la sécurité et l'hospitalité. Les toiles pendant aux arbres formaient une espace de vaste réseau qui semblait envahir la forêt toute entière, et les ossements trônant en son centre parachevait la scène. A ses yeux, cet endroit ressemblait plus au lieu dans lequel ils tomberaient dans leur première embuscade qu'à celui où ils passeraient leur première nuit paisible. En silence, pour une fois, ses yeux se posèrent sur l'orée de la clairière qu'il scruta attentivement. Après quelques secondes, il se dirigea vers le groupe de tête de l'expédition.


En chemin, il passa près d'Asteria, qui venait de demander à haute voix s'ils allaient installer le campement pour la nuit.

- "Ca sera à Séléna de trancher, mais ça ne me semble pas être une bonne idée." Son ton était beaucoup plus sérieux qu'à l'accoutumée, et ses sens en alerte. "Nous sommes sur la piste d'une menace inconnue, et cet endroit respire le danger. Nous devrions rester sur nos gardes."


Si Léander était doté d'une assurance sans faille et d'une confiance totale en ses capacités, il n'en restait pas moins profondément respectueux de la hiérarchie quand il s'agissait de prendre une décision ou une initiative, contrairement à certains, même s'il ne se départait que rarement de son extravagance habituelle devant ses supérieurs. Qu'il le fasse un tant soit peu cette fois était bien le signe qu'il pressentait une menace. Sans s'arrêter, il continua à marcher d'un pas vif vers Séléna, la seule Sentinelle de leur groupe d'expédition.

- "Mademoiselle Brinclair..." Il lui adressa un petit signe de la tête, mais il n'y avait pas dans sa voix la petite étincelle de charme qu'il y insufflait d'ordinaire en saluant la belle nymphe. "J'ai un mauvais pressentiment sur cette clairière. Ai-je votre accord pour une reconnaissance des alentours immédiats ?"

En tant que faucheur, et paré d'une armure légère, il était parfait pour le rôle d'éclaireur, qu'il revêtait souvent. A la moindre menace il pouvait revenir au campement pour ainsi dire d'un claquement de doigts, et Séléna le savait. Quand il obtint son accord, il se mit en route sans plus attendre.


Leander franchit l'orée de la clairière et avança de quelques mètres à travers l'épaisse végétation. Très attentif au moindre détail de son environnement et l'oreille tendue, il entreprit de faire un vaste cercle autour de la clairière en cherchant le moindre signe de passage en direction de celle-ci. Sa progression était lente, d'autant plus qu'il regardait autant à ses pieds qu'au dessus de sa tête, et qu'il se tenait prêt, au moindre signe de danger, à disparaitre pour se rematérialiser auprès du reste du groupe; quelques fines volutes des cendres caractéristiques de sa race crépitaient et tournoyaient autour de sa main droite. Ce n'était pas un couard, mais il était seul en territoire inconnu, et sa mission était de confirmer ou d'infirmer la présence d'un danger immédiat, pas de l'affronter seul au mépris de la prudence et du protocole.


Il lui fallut une dizaine de minutes à crapahuter dans les buissons, les ronces et les herbes hautes, sans mentionner les occasionnelles flaques de boue qu'il commençait à bien connaître, avant de repérer ce qu'il cherchait. Il était obstrué par la nature qui reprenait ses droits, mais il y avait bien là un sentier, vraisemblablement tracé par le passage autrefois régulier de créatures, quelles qu'elles soient. Il dégaina son arme d'hast et dégagea tant bien que mal sur quelques mètres le chemin devant lui. Le sol était marqué de traces animales, mais aucune qui ne paraissait particulièrement récente.


Sur ses gardes, il s'enfonça davantage sur cette voie, en espérant obtenir une vision dégagée sur ce qui se trouvait à son extrémité. Il ne fallut que quelques dizaines de mètres pour qu'il obtienne ce qu'il cherchait : devant lui, le chemin se dirigeait vers un arbre gigantesque, dont il ne reconnaissait pas l'espèce, qui dominait entièrement le marais. Malgré la distance, il put voir que son tronc massif était fendu et révélait un intérieur creux. Difficile de dire sans connaître la faune et la flore locale s'il s'agissait là d'une occurrence naturelle, ou si cela provenait d'une activité animale. Pour ce qu'il en savait, cela pouvait très bien mener à l'antre d'une quelconque créature, peut-être même de celle, ou celles, qui laissaient cette toile dans les arbres et ces ossements derrière elles.


Il en avait assez vu : il fit demi tour, et prit soin sur le retour de dégager davantage le chemin, afin de pouvoir peut-être s'y engager plus tard avec le reste du groupe. Quand il parvint enfin à la clairière, il se dirigea de nouveau vers Séléna.

- "Je suis de retour. J'ai trouvé des traces de passage en direction de cette clairière. Le chemin était envahi par la végétation et ne semble pas avoir été utilisé depuis plusieurs jours au bas mot, mais il mène droit à un arbre immense, qui surplombe tout le marais. Le tronc parait creux, je ne me suis pas approché davantage pour déterminer s'il s'agissait d'une source de menace ou non, mais c'est peut-être là le refuge ou la tanière d'un animal. Peut-être même est-ce lié à la piste que nous suivions, voire à ce qui a laissé la clairière dans un tel état."

Résumé:

Un rapide tour d’horizon et on s’en va. C’est pas plus mal, je sais pas exactement où on est mais c’est clairement un milieu hostile. Ça m’embête quand même un peu de partir sans plus d’info sur eux. Surtout que, j’suis pas un expert mais si la on est dans un garde manger, ça veut dire que y’as un nid ailleurs. Je crois pas que beaucoup de bestioles mangent là où elles dorment. Enfin, on a d’autres problèmes que ça, si jamais on tombe sur des armes ou des affaires dans le coin on saura à qui elles appartiennent. Mais en soit, même si j’ai envie de savoir qui ils étaient, je peux me passer de retrouver leurs affaires. On pourra très bien leur rendre hommage sans ça une fois qu’on sera rentré. Les premiers héros inconnus. Enfin, on sait même pas s’ils viennent bien de chez nous… Ouais, je me prends trop la tête avec tout ça, c’est pas à moi de réfléchir à cette partie de l’histoire, j’ai déjà assez à faire à surveiller les gens et limiter les blessures. Et avec leur manie de s’éparpiller à tout va, on fait plus simple comme travail.

Sans compter que pour venir couronner le tout, voilà notre grande amie la pluie. Ça, ça va me rajouter du travail. Faut pas qu’on perde plus de temps ici, la forêt va pouvoir limiter un peu le torrent qui nous tombe dessus et pour le reste je me débrouillerai. Si y’avait pas cette drôle d’odeur dans l’air je serais même tenté de dire qu’au moins ça va permettre de laver un peu la blessure de notre Sylphe cascadeuse mais quelque chose me dit que c’est pas si simple. En rentrant je m’attaquerai à faire un manuel pour les futurs soigneurs dans les expéditions mais pour l’heure on va faire ce qu’on sait très bien faire. Improviser, limiter les risques et s’en tenir à ce qu’on connaît. Pour l’heure, en route vers l’arbre.

Léander avait raison, le coin est vraiment pas mal. Presque trop pas mal d’ailleurs, je vais bien laisser passer les gens plus compétents que moi passer devant et analyser l’endroit, s’assurer que rien ne risque de nous tomber sur le coin de la tête. Il avait l’air de dire que le passage entre ici et le garde-manger ne relevait pas de trace de passage récente, ce qui est une bonne et mauvaise chose. Encore une fois je me prends trop la tête, si un problème doit arriver tout le monde est plus que compétent et saura se débrouiller. Je me moquais des membres du groupe qui étaient trop tendus en début d’exploration et me voilà faire la même. Ça me ressemble pas. Deux cadavres, une pluie bizarre, une créature inconnue et me voilà à faire attention au moindre de mes pas ? Non, vraiment ça ne va pas.

“Pour ceux qui sont vraiment trempés et qui voudraient se réchauffer rapidement venez me voir, je m’occuperai de faire des flammes qui ne brûlent pas la zone. Quand on sera installé, que la pluie sera arrêtée et qu'on est sûr que la zone est sans risque, je compte sur vous pour changer de vêtements et mettre ceux-là à sécher, si on peut éviter les rhumes et compagnies c’est pas plus mal.” Je parle à voix mi-basse, peut-être une mesure de prévention de trop mais on sait jamais. Et pour une fois qu’on est tous au même endroit, autant en profiter. “Osiris, j’ai pas bien vu mais avec la pluie tes cartes doivent pas être dans un super état non ? Je vais pas te mentir que si des gens ont besoin de se réchauffer mais pareil, si tu pense qu’on peut se débrouiller pour que je fasse sécher l’encre ça peut se faire.” Grand sourire en croisant les bras devant lui. “Je pourrais te faire la blague de ‘et si jamais ça marche pas on pourra toujours les utiliser pour allumer un feu’ mais je pense que tu vas t'en passer. Et elle est un peu trop prévisible. Je suis sûr que même Léander aurait pas osé la faire.”

Ca faisait un bon bout de temps qu'on ne m'avait pas lancé un regard plein de pitié et je dois dire que ça me manquait pas des masses. Le plus amusant dans tout ça c’est que la situation a foutrement rien à voir mais que la façon de regarder, elle, ne change pas. Au final, que tu t’empales un membre ou que tu fasse un AVC, c’est le même combat. Un combat que personne connait à part toi. Et dans le fond, je pense que je préfère me transpercer cent fois le bras plutôt que de revenir en arrière. Ça n'empêche que j’ai sacrément envie de tirer la gueule quand la malakim me pose cette question. Pas qu’elle soit responsable de quoi que ce soit, au contraire mais j’ai toujours aussi mal, les points sont toujours aussi fébriles, il pleut comme vache qui pisse, j’ai de la boue jusqu’aux chevilles et j’ai déjà répondu au moins trois fois à cette putain de question. Mais la pauvre y peut rien et je peux pas ouvertement lui dire ce que j’en pense, elle ne fait rien d’autre que s’inquiéter. C’est plutôt sympa je dirais même et en d’autres circonstances, j’apprécierais sans doute sa sollicitude. Alors je me fend d’un sourire qui s’étire pas vraiment jusqu’à mes oreilles.

- Ça va, j’te remercie.  Un faible sourire, plein de pitié et de compassion et elle s’en va.

Je soupire lourdement. Dans le genre ambiance maussade et caractère morne -ou l’inverse peut-être- je pense qu’on atteint des sommets. Entre les coincés qui font la gueule, ceux qui s'ennuient et ceux qui… Et ceux qui quoi d’ailleurs ? Qui foutent des trucs à la bouche sans l’ombre d’un instinct de survie visiblement, on fait une belle brochette de bras cassés. Sans mauvais jeux de mots. Moi je lance un nouveau regard à mes bouts de toile. Je sais absolument pas ce que c’est et d’un côté, je suis pas certaine d’avoir envie de le découvrir. Quelque chose me souffle que c’est gros et pas commode. Un peu comme les bestioles de ces livres de fantasy. A ce moment là, je peux pas m’empêcher de penser que le créateur de ce monde était peut-être un génie mais aussi un fou. Quitte à créer un nouveau monde, pourquoi le rendre aussi dangereux ? Le nôtre l’était déjà pas assez ? On peut même pas parler de régulation de population quand on est à peine trois cents idiots dans cette fichue ville.

J’hésite à poursuivre avec la toile mais je me range à l’avis général : Ça pue et pas au sens littéral du terme. De toute façon le grand manitou à dit de pas s’attarder et pour une fois, je suis plutôt de son avis. Alors je me tais et je suis le mouvement.

Je m'arrête un instant, la proposition d'Uriah me fait envie, je suis trempée et je dirais pas non a un chauffage ambulant jusqu’à ce que j’arrive à ce tronc d’arbre. Un petit côté boite de nuit en pénurie d’électricité, mais c’est mignon et ça m’intrigue. Astéria est déjà accoudée à l’arbre, elle l’observe comme si c’était une relique ou un trésor. P’t’être bien qu’elle a raison. Toujours est-il que je lui passe sous nez, je prend appuis comme je peux et je met le nez dedans -pas littéralement- pour observer cette étrangeté.

Résumé: