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Saison froide ☃︎ Azamyr • An 118 — Novembre à Décembre

Imaginez un monde dans lequel votre avenir est incertain, la fin se rapprochant de plus en plus, sans que vous puissiez changer votre destin. Un jour, une solution est trouvée, vous permettant d’espérer, de croire en la possibilité d’une autre vie, une nouvelle vie. Il vous faut trouver une clé, vous permettant de traverser le portail menant à un nouveau monde. Là, tout est possible, vous naissez à nouveau, différent. Vous devrez faire face aux dangers, aux complots, aux découvertes. Mais l’avenir s’étend devant vous. Le petit journal d'Azamyr

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Morts et vivants ont tant de chose à se dire ! / Ft Galatéa

Frédéric LaFleur
Maison de la Flamme et de l'Ombre

Des petites règles dont il n'avait pas été question plus tôt. Toujours tant de retenue, et de circonvolutions... Il est des danses que l'on apprend sans mettre un pied dans une salle de ballet. Des mots, puis un souffle, et finalement, un contact. Heureusement pour le spectre, la sorcière ne pouvait lire dans son regard le tremblement qui le traversa tout entier. A moins qu'elle ne le devine, à l'inspiration plus frémissante que le LaFleur ne put retenir. Faire tourner les têtes avait ce risque que le tourneur finisse retourné. Jouant avec ses limites,Frédéric osait tout juste sourire, aucunement rire, divers propos lui venant en tête pour répondre à la moqueuse Galatéa, et qui finirent en bourbier d'intentions informulées. Etait-il temps de céder ? Le désirait-elle ? Jusqu'à quel point ? Devraient-ils tenir encore jusqu'à oublier le sens de chaque mot ? Ou s'empêtreraient-ils dans leur manière jusqu'à oublier les raisons de leur jeu ? Ces réflexions fusèrent sans qu'un mot ne franchise ses lèvres, à peine agitées par son souffle fébrile. Alors ! Alors... Alors ?

Alors il fit un grand pas. Reculant, le mécréant, il s'arracha à l'infime contact d'un nez, le bout du sien - oups ! - frôlant dans sa fuite la pointe d'un menton, leur regard se croisant un infime instant. A nouveau, le LaFleur put respirer, son esprit s'éclairant d'autant tandis qu'il se retournait, offrant pour seule réponse à la tentatrice, la danse souple de sa chevelure et du tissu le couvrant, en partie, soulignant tantôt la courbe de son dos, et parfois le galbe d'un fessier d'homme. Faisant face au miroir, un regard inquisiteur intense dévisageait le reflet de la sorcière.

"Choisir... Il était à nouveau capable de parler. Mais, étrangement, son timbre était plus grave et profond que plus tôt. Il vous faut choisir... Entre une robe correctement ajustée. Ou... Lentement, il avait fait le tour du miroir, se plaçant derrière lui tel un... Bouclier ? Une robe qui vous semble... Une seconde peau."

Ce dernier mot semblait paré à affronter l'hiver... Secondé par le regard vif par delà le cadre de bois, et l'angle d'un sourire qui se cachait parmi les ombres. Quant aux mains du spectre, elles quittèrent le cadrant et s'approchèrent du reflet de la sorcière. Car, ainsi tourné, le miroir cachait en grande partie le tailleur, et renvoyait à son invitée sa propre image, sa silhouette grandie par son vêtement. Et cette silhouette de femme, suggérée, dissimulée, magnifiée par l'élégant tissus, cette silhouette, son reflet, se vit distraitement parcourue par les longs doigts du médecin, glissant tranquillement le long d'un visage enfiévré, une poitrine palpitante, et du reste du rouge ne trahissant rien de ce qu'il se passait plus bas.

"Une robe pour les dominer tous, une robe pour les charmer, une robe pour les guider tous et dans les ténèbres les lier. Un petit son étouffé, tel un rire supplicié. ...Et écouter moi perdre le fil de cette histoire. Ah...!"

Doucement, non sans un long soupir, le LaFleur étreignit le miroir, et vint poser sa tête de côté sur le cadran, contemplant son invitée avec... Un désir qu'il ne cherchait plus à cacher, ses mires accrochant le moindre détail du visage de la sorcière.

"Permettez que je parle honnêtement, Mademoiselle Galatéa. Chaleureux, son timbre évoquait sans détour le bruit de draps de soie froissés. A présent, je m'imagine volontiers céder à la tentation de votre bouche, puis vous faire découvrir la douceur du tapis de toute l'étendue de votre peau, jusqu'à la pointe... De vos orteils. De votre vêtement je vous débarrasserai petit à petit, baiser par baiser, jusqu'à ce que nous n'ayons plus conscience d'être au milieu de la nuit ou à l'aube. Après quoi, je pourrais prendre librement vos mesures, dans les moindres... Détails. Parmi d'autres idées... Ses paupières s'abaissaient paresseusement, sans parvenir à cacher son trouble. Ou sinon... Je pourrais mettre à votre disposition une robe fine et le faire plus sagement, ce soir comme un autre jour. Un soupir faussement déçu. A mon grand regret, je dois avouer mon plan machiavélique : je n'ai pas réussi à vous faire perdre la tête. J'abats donc mes cartes. Un clin d’œil fripon. Et cette danse-ci... Je vous laisse le loisir de l'initier, ou de la changer à votre convenance. Et il ajouta, encore plus bas, taquin. Alors, que faisons-nous ?"
Frédéric LaFleur
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Galatéa
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Visiblement ils avaient un point commun supplémentaire. Frédéric LaFleur ne badinait pas avec la qualité de son travail.

D'un long pas, il s'arracha à sa proximité. Sa chaleur disparue et elle prit une profonde inspiration. Ses dents se serrèrent pour juguler la frustration tout ensoupirant un discret éclat de rire. En un frisson, la sorcière se réanima après une immobilité quasi totale. Ce Pygmalion avait rendu la vie à sa statut d'ivoire pour mieux s'en éloigner. Dans le miroir, il put voir les yeux de la jeune femme vagabonder sur son dos avant qu'il ne se retourne pour les capturer tout en la mettant face à son reflet.

Le velours de sa voix était encore plus chaud. L'image de cette robe qu'il tissait de ses mots la caressait là où le ruban s'était serré un instant plus tôt. Une seconde peau suivant la sienne... Celle du tailleurs était-elle douce ? A côté de l'image dans le miroir, il semblait encore plus grand. Et quelle grandiloquence ! Une poésie bien sombre, aussi suave que s'il voulait la pousser a faire un pacte avec le diable. D'ordinaire c'était plutôt elle qui inquiétait par les possibles conséquences d'un accord concernant son champ d'expertise. Parangon de noirceur aux yeux vifs et au visage longé de longues rivières d'encre, il en faisait bien trop. " C'est si joliment dit. " rit-elle tout bas. En même temps pouvait-elle seulement prétendre que cela lui déplaisait ? A demi peut-être car elle y lisait sa réponse. Il préférait la légèreté du jeu. Un peu déçue, un peu piquée par la distance qu'il avait prise, elle ajouta. " Une robe pour en retirer une autre... " Elle avait reprit un peu de souffle et son esprit repointait le bout de son nez avec son amusement incisif... Ce qui ne l'aidait pas beaucoup. Les images que ce regard et cette main frôlant le verre formaient dans son imagination ne faisaient qu'électriser sa peau davantage.

Pourtant, elle avait perdu le fil. Il s'était retiré et son art restait au centre de ses préoccupations, ce qu'elle pouvait comprendre et même respecter. Pour garder contenance, elle fit un petit pas, quittant l'appui du mur, et ramena mécaniquement sa chevelure sur son épaule. Il s'amusait d'elle, bien plus intéressé par la création que par la découverte. Il aurait pu le prétendre, gauchir le souvenir de ses regards et l'exactitude de ses mains pour renvoyer cette tension dans les affres de leur mémoire. Elle avança tranquillement vers son reflet, belle joueuse puisqu'il préférait voir que toucher. D'ici quelques jours ou quelques semaines, cette tension n'aurait plus été qu'une méprise, un jeu simple dans lequel chacun pouvait prétendre n'avoir jamais vraiment été sérieux.Il aurait pu prétendre ce qu'il voulait, jusqu'à ce profond soupire.

L'honnêteté. Quelle idée de passer à l'honnêteté dans de telles circonstances ?

Elle regardait son propre visage, tentant d'ignorer le regard de Frédéric, quand son propre nom la guida de nouveau à lui. Ses yeux d'un bleu incandescent. Ses mots désagréablement limpides. Il lui lançait droit dans les yeux la réalité de ses intensions. Sa respiration fit un écart, une inspiration plus ample pour un sourire en coin tandis qu'elle peignait ses cheveux du bout des doigts. Ses mains et son ruban... " Frédéric... " Un nom. Un faux reproche amusé et une envie tout à la fois. Les yeux de la sorcière se perdirent sur son reflet, mais elle ne se regardait pas vraiment. Les doigts qui peignaient la masse neigeuse firent distraitement un écart pour caresser son cou pendant qu'elle l'écoutait continuer. Jamais on ne l'avait soumise à un tel supplice. Jamais un homme n'avait pris ce pas de recule. Elle n'aurait pas imaginé que l'un d'eux puisse le faire en se remettant ainsi entre ses mains. C'était... nouveau.

- Vous... " Elle expira. Pourquoi ne pas simplement se taire et profiter comme disait l'autre ? Vivre. Elle n'avait besoin que de vivre. ' Rit, Danse, Baise... ' soufflaient les voix du passé. Elle lui semblait de moins en moins justes. Elle ouvrit la bouche et la referma en un sourire mutin sans que rien ne soit sortit. Pas le moindre son. Un sourire. Un éclat de rire dans un soupire. Elle ne pouvait pas simplement tenter en silence. ça aurait été souiller cette soirée et la connivence qui s'était établie un peu plus tôt. La tranquillité et la franchise autant que le feu qui couvait en elle et que le tailleur maîtrisait en une lente, bien trop lente, morsure.  

Elle se tourna vers lui, posée, cet éternel assurance au coin des lèvres, mais bien moins joueuse que précédemment. Elle aurait juré qu'elle ne pourrait faire autrement que d'être maladroite, mais elle ne pouvait simplement jeter l'éponge. Une envie tempérée d’appréhension. Se laisser aller à la fougue de l'instant, le réclamer comme un défi pour prouver ce qu'elle était, ça n'avait rien à voir avec le fait de soutenir tout ce que contenait ces prunelles pour prononcer à voix haute des mots aux passé honteux. " Si le vouvoiement est encore de mise, je dois dire que je pensais pouvoir vous voler un baiser bien plus tôt. " Elle avait légèrement relevé le menton, provocante et malicieuse malgré l'aveu qu'elle cherchait à tisser. " Vous avez une bouche qui invite à ça... S'en est difficile de penser à autre chose...  Mais... Je crois que, comme beaucoup d'autres, vous pensez que la sorcière aux yeux noirs que je suis est... " Elle fit un pas pour s'approcher de lui et du bord du miroir. Son image sortie du cadre et elle prit encore une seconde avant de tenter une formulation. "... Une danseuse plutôt expérimentée. " Elle pencha la tête sur le côté sans détourner les yeux. " Ma condition sur Terre ne me le permettais pas. Et ici... Le peu de cavaliers qui m'ont donné envie de faire quelques pas... " Elle donna un petit mouvement de tête de l'autre côté et soupira. " Disons que ces deux hommes et moi, on ne s'est plus jamais adressé la parole une fois la musique arrivée à son terme. Le premier parce que le premier baiser avait été la partie la plus agréable. Le second parce que tout avait été beaucoup trop... " Son souffle vibra un instant, par gêne et par absence de mot simple. Elle manqua de détourner le regard et pinça les lèvres. "... voir les bleus et le sang dans le miroir le lendemain m'a fait réfléchir. "

Et voilà, super pour casser l'ambiance. Parler d'un autre. Quelle bonne idée. Sa poitrine et sa gorge se serrèrent un peu mais elle n'avait toujours pas détourner les yeux. Elle avait choisi de parler et elle assumerait. Quand il ne lui restait rien, il lui restait au moins ça. Mais intérieurement, elle n'en menait pas large. Elle sentait encore sa chaleur contre elle, la soif décadente que lui inspirait ses lèvres pleines. Elle déglutit, la malice taquine se laissait grignoté par une tentation plus directe." Alors oui, j'ai envie de sentir vos lèvres sur moi. Mais je n'ai pas envie que ce soient les derniers mots que nous échangions. Et la douleur, j'en ai eu mon compte. " Il n'avait pas l'air violent. Il n'avait pas l'air doux non plus. Se désintéresserait-il une fois qu'il aurait passé un moment en sa compagnie ?Elle n'arrivait tout simplement pas à savoir comment cela pouvait tourner ni sur quoi cela pouvait déboucher. " Ce n'est sûrement pas la réponse que vous attendiez j'imagine... " souffla-t-elle, une pointe de vulnérabilité cachée dans le creux de ses yeux noirs malgré sa posture droite et sa voix qui parvenait à restée en contrôle. Bien trop en contrôle. Elle était sûre de s'est très mal exprimée. Elle ne voulait simplement pas que cela se passe comme les première fois. Un coup de tête et elle avait cédé à l'appelle du corps ou à celui d'un être aimé pour finalement perdre tout contrôle et ne savoir plus que faire ni que dire, ne posant quelques limites que bien trop tard.

Elle ne voulait pas être une chair qu'on utilise. Un fourreau parmi d'autres qui permettait d'oublier sa peine et de passer sa rage. Elle avait besoin de savoir, de voir sa réaction histoire de se traiter d'imbécile avait qu'il ne pose les yeux sur sa peau mise à nue. La déception de la savoir moins entreprenante serait-elle suffisante pour que le beau tailleurs trouve une excuse et la pousse à rentrer chez elle ? Leurs attentes seraient-elles si peu alignées qu'il chercherait à la jeter dehors ? Le cœur battant de doutes, elle était venue se tenir une nouvelle fois toute proche de Frédéric, une main sur le cadre du miroir pour s'empêcher de croiser les bras.

Galatéa
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Frédéric LaFleur
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Galatéa lui fit ce petit plaisir-la, de ne pas chercher à - complètement - cacher son propre trouble, après ses propos éhontément francs. Patient, le spectre savoura tranquillement les mots non prononcés, l'égarement des yeux noirs, les hésitations pavant sa réflexion alors que, peu à peu, elle trouvait quoi dire à ça. Certaines y perdaient la parole, ce qui avait son charme mais demandait de la retrouver ensuite. Content, le LaFleur l'était d'avoir correctement jugé la 'résistance' de l'Enchanteresse à un peu d'indécence. Son approche lui demandait une certaine concentration pour demeurer tranquillement contre le miroir, en lui donnant un peu de temps... Les occasions pour un baiser volé n'ont pas manqué pourtant. Amusé, il l'était, tout en réprimant avec raison ses ardeurs, comme il le découvrit par des aveux d'inexpériences. De quoi lui faire hausser un sourcil. "Votre répartie n'en laisse rien paraître." souffla-t-il, sans chercher à l'interrompre. Et encore une fois à raison car la surprise suivante lui fit un tout autre effet.

Que Galatéa ne détourne pas le regard la laissa libre de voir le beau visage séducteur se vider, se raidissant, alors que les mires bleutées s'ouvraient grandes pour la fixer, pour fixer au delà d'elle d'autres qu'il ne pouvait que deviner à travers ses mots. Ses longues mains s'en crispèrent sur le reflet, perdant leur nonchalance. Le LaFleur, de part son métier comme ses goûts personnels, n'était pas porté sur la violence physique. Pour s'en prendre à quelqu'un, il lui semblait que le langage offrait de bien plus riches opportunités. Et pourtant, en cette instant, après une telle montée de chaleur - il n'est pas ici question d'un feu de cheminée -, il ressentit l'impérieuse envie d'organiser la courtoise rencontre entre ses phalanges et le visage de quelqu'un.

Elle ne serait pas la première... Un frisson, bien plus désagréable que les précédents celui-la, le prit, lui tirant un soupir tremblant, alors qu'il relâchait le reflet fuyant que ses ongles avaient griffé malgré-lui, détournant le regard, le temps de reprendre contenance, le plongeant ailleurs. Tant de jeu, une délicate vulnérabilité, et soudainement une telle évocation... Cela lui faisait l'effet d'un goût amer gâchant un délicieux nectar si précieusement préparé. Mais, ironiquement, quoiqu'en ressentent certains de ses patients, son métier lui avait grandement appris sur la gestion de situations délicates. Et, presque sans qu'il n'y pense, il prit ce recul nécessaire pour respirer à nouveau normalement et, simplement, adopter une approche différente.

Ainsi, Frédéric put à nouveau regarder Galatéa qui s'était rapprochée, après ses derniers aveux : un désir, une crainte, une blessure... Une peur. Très chère, pas de cela ici, non, voyons... ! Heureusement il tint coi une réaction trop précipitée de rejet et d'indignation. Aussi sûrement que son invitée avait précautionneusement choisi ses mots, il en fit de même. Naturellement, un sourire chaleureux raviva ses traits, alors qu'il faisait le tri... Pour ne pas se montrer trop impudent non plus.

"Très chère... A mon honnêteté vous avez répondu par la vôtre... Un silence où il savoura ses mots. Vous rendez-vous compte de la beauté d'un tel premier pas ? Un petit reniflement amusé. Un premier pas de danse après... Des échauffements, dirons-nous."

S'appuyant toujours de la tête sur le miroir, il ne le tenait plus tout à fait, pourtant ses mains n'exploraient plus, comme prisonnières de sa retenue, à présent que la sorcière était de nouveau à portée. Désormais, un geste pouvait transformer le fantasme en réalité mais... C'eut été précipité. Alors, vil tentateur s'entêtant sur la corde raide, Frédéric savoura ses idées, et en partagea certaines, ses yeux baissés sur le visage à l'expression aussi brave que l'incertitude qu'il imaginait derrière. Insupportable joueur, il prit le ton des contes, doux et effacés, comme pour évoquer sans le dire qu'i y avait là tout un univers que nourrissait la vue dont se régalaient ses yeux.

"Faute de connaître la culture de ces messieurs, il me semble de bon ton d'expliciter la mienne. Certains commenteraient qu'elle est bien française mais, je maintiens : il s'agit de la mienne. Car même par chez moi j'ai croisé des brutes du sujet. Un soupir d'une légère déception. J'imagine cette danse... Comme un sport. Non, non, ne vous offusquez pas tout de suite. Et comme un sport... Elle demande un apprentissage, de la pratique, et une certaine sensibilité pour devenir art. Et, comme toute pratique avec un partenaire... Elle se révèle différente avec. Chaque. Personne. Une langue mutine osa se laisser voir un tout petit peu entre ses dents, avant qu'il ne poursuive d'un air... Rêveur. La première chorégraphie est le moment de la découverte, de la... Mise-en-bouche. Une nouvelle fois, son regard chercha à accrocher celui de Galatéa, et surtout, à ne pas le lâcher, comme si dans ses simples mires elle pouvait en voir davantage que le bleu. Et je n'irai pas comparer mon expérience à celle de vieux couples mais, libre de tout engagement, intéressé seulement par des moments à nous, chaque nouvelle opportunité me semble le moment... De s'apprécier... D'expérimenter... Et de se faire du bien. Nous ne sommes pas de simples pâtisseries, oubliées après consommation, consommées de la même manière d'un jour à l'autre. Un petit silence, qui voulut en dire plus que ces simples mots... Avant que l'anticipation ne le fasse rosir. Maintenant, pour rentrer dans le vif du sujet, si vous voulez savoir... Ah, il sonnait légèrement plus rauque. L'un de mes grands plaisirs est d'admirer... De jouer de mes doigts comme d'un violon, de mes lèvres comme d'un pinceau et de voir la chaleur consumer tout entier un corps et un esprit... L'on m'a déjà nommé 'odieux manipulateur', pourtant la surprise de se faire entendre dire des douceurs alors que toute décence avait déserté la pièce, semblait avoir un certain... Effet. De même que reprendre la main après m'être fait... Guider."

Que tout ceci me donne chaud. Et pourtant, sans être installé directement devant le feu, un peu de fraîcheur persistante - qu'il était loin le confort moderne - lui hérissait encore la peau, alors que son cœur battait une insistante chamade. Il espérait avoir balayer les doutes de son invitée, au moins. Pour le reste... Il devrait faire ses preuves. Et pour cela, demeurait la question du pas suivant, qui ne devait pas être le sien. Enfin... Il se concéda un geste, celui de soulever d'une main frémissante la chevelure de la sorcière, pour la porter à son visage, comme pour y cacher ses intentions criantes... Et en savourer la douceur et l'odeur. Sans contact direct avec la peau.

"... Reste-t-il un mystère à éclaircir, Enchanteresse ? Ajouta-t-il du bout des lèvres, tel un conspirateur. Si ce n'est vos nombreux sortilèges..."
Frédéric LaFleur
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Galatéa
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Elle laissa échapper un sourire fugace, plus bravache au milieu de ses tentatives pour trouver les mots justes. " Je ne suis pas non plus une oie blanche. J'aime séduire. Je ne m'interdit rien de ce qui me plait. Mais je suis... rarement séduite en retour. " parmi tout ce qu'elle avait à dire ce n'étaient pas les mots les plus difficile à prononcer. Mais tout de même. Les doutes et les masques qu'elle laissait s'écailler. Une camarade de jeu qui ne connaissait pas bien les règles était sans doute laçante d'avance. Entre ça et l'étalage de ses expériences, ce n'était sûrement pas le genre de réponse qu'attendait le tailleur.

Ce qu'elle n'attendait pas, elle, c'était la froideur tendue qui était soudain passé sur les traits de son vis à vis au bout de sa tirade. Une colère ou plutôt un agacement ? Il détourna les yeux sans qu'elle ne parvienne à savoir si c'était à cause de sa déception à lui ou de ses anciennes déconvenues à elle. Alors elle articula cette phrase qui sonnait pathétique à ses propres oreilles, un semblant d'excuses qui n'en étaient pas. Elle n'avait pourtant pas retraiter et ce serait hors de question tant qu'il ne la regarderait pas dans les yeux. Elle s'était même rapproché, cherchant son attention, même si ce n'était que de l'incompréhension qu'elle devait voir. Elle avait peur, oui, surtout d'être particulièrement déçue d'elle ou de lui. Sur le bord du miroir, ses main était à un souffle de cette de Frédéric.

Mais il n'y avait aucune distance dans le regard qu'il posa à nouveau sur elle. Elle cilla, tant elle en fut étonnée. Un sourire chaleureux arriva bien vite en support de ce regard cryptique et quelques mots caressant qui pouvaient tout aussi bien être une petite tape sur le haut de la tête qu'un souffle chaud flirtant sur sa nuque. Elle leva un sourcil, suspectant la blague, le rejet ou la remarque qui allait forcément venir. Mais non. Il semblait vibrer d'un amusement contenu. Il prenait son temps, égale à ce qu'il avait été jusque là, mais ne semblait réellement échaudé. Au contraire. Il semblait même en profiter. S'en délecté. Elle se fit bien plus suspicieuse, alors, et un léger sourire félin revint également sur ses lèvres en l'écoutant commencer sa lente et savoureuse explication.

Évidemment, elle fronça derechef les sourcils et allait l'interroger sur le sport. Quoi un sport ?! Quelque chose de si intime, de si intense, qu'on diabolisait depuis plusieurs milliers d'année et dont on privait les femmes depuis sans doute encore plus longtemps ?! Mais le renard devança son emportement et cette vipère prête à mordre, il la fit ondoyer sans difficulté entre ses doigts. Elle referma les lèvres, de nouveau pendue aux siennes, tandis que les restes de cette provocation chassait la vulnérabilité qu'il avait tout de même aperçu à plusieurs reprises. Il captivait son attention, reprit possession de son regard d'encre, de l'amplitude de sa respiration.

Il restait léger dans les mots qu'il employait. Il suggérait, laissait miroiter des images et des sensations à la surface d'une eau bien plus profonde qu'il n'y paraissait. Il tissait une ambiance, éclairé par la couleur plus soutenue que prenaient ses joues. Le changement d'intensité était si subtile sur sa peau café que Galatéa douta qu'il y ait eut un réel changement. Son visage lui plaisait tout simplement. Pas d'attache, disaient cette bouche aguicheuse. Pas d'engagement. Seulement un temps, un moment, un geste, une envie. Un frisson lui remonta le long du dos et les paupières de la jeune femme cillèrent lentement, déconcertée. Son cœur battait à grands coups sourds, serré et haletant en un même instant. Pour le meilleur et pour le pire, il n'y avait aucun sentiment spécial dans ce qu'il disait. Il n'y aurait pas de mensonge cette fois. Pas de je t'aime. Pas de mirage. Pas de morsure. Et pourtant cette alchimie confiante, elle ne pouvait la renier. Elle n'en avait aucune envie d'ailleurs. Etait-ce seulement possible ? S'il le disait, elle était tentée de le croire. Fortement tentée.

Les tonalités rauques de sa voix chaude lui murmuraient à l'oreille, plus insidieusement que l'Ombre ne l'avait jamais fait. Elles évoquaient milles découvertes encore inconnues. La chaleur de ses doigts. La douceur de ses lèvres. Et tout ça alors qu'il était juste là, devant elle. L'animal... En un geste pensif, la main qui n'était pas restée accrochée au miroir était retournée se cacher dans le dos de la sorcière. Mais, à l'abri des regards, le bout de son pouce caressait le tissus du manteau au creux de ses reins. Un faux plis se retrouva pris entre son majeur et son index, roulant la texture de la laine tissée, épaisse et un peu raide. Des dents blanches se révélèrent un instant en un sourire plus amusé. Odieux manipulateur, oui... Il pouvait l'être, elle n'en avait absolument aucun doute.

Dans de mots et de possibles dont elle ne connaissait que la couverture. La curiosité n'était pas le moins présent de ses défauts. Reprendre la main... Le guider... Et elle... Oh par tous les diables et les saints, elle avait envie d'en faire autant. Dans l’ombre de ses yeux, sa main blanche descendait le long de son buste pour découvrir jusqu'où cette légère toison noire se poursuivait. Prendre le temps de regarder, de sentir, d'éprouver. Découvrir ses réactions à lui et reconnaitre les siennes. Un réel duo ?

D'un mouvement, il caressait ses cheveux. D'une question, il lui arracha un rire frémissant. Elle n'avait jamais entendu ce titre prononcé avec une telle indécence. Enchanteresse... Le sens en était parfaitement différent lorsque ces quelques syllabes roulaient sur la langue de Frédéric. De son dos, la main de la sorcière s'était de nouveau aventurée vers l'avant pour caresser les doigts qui venaient de s'emparer de sa chevelure, les écartant mécaniquement du visage tout en longueur. Les mèches blanches coulaient doucement entre les doigts du tailleurs. " Je crois que je commence à voir le genre de tableau que vos lèvres peuvent peindre. " Elle baissa le regard sur le bout de ses ongles qui retraçait les bords des lambeaux d'encre rouges sur le revers des longues mains.

- Mais il reste peut-être un ou deux mystères vous concernant. "

Sa voix s'était quelque peu voilée durant ce moment de silence. Elle releva les yeux, mutine, et s'appuya à demi sur le miroir, l'obligeant à le lâcher au moins un peu. Quelque chose semblait devenir à nouveau limpide après la façon dont elle avait cherché ses mots, sans pour autant se revêtir de quelque chose qui ne lui convenait pas. Celle qu'elle avait été tout au long de la soirée n'était pas un simple masque ou une coquille dénuée de substance. Elle aimait sincèrement ce qui se passait et la sincérité dont elle avait réussi à faire preuve ne faisait que lui rendre la réaction de son cavalier plus agréable. En regardant au fond de ses yeux, elle ne se sentait pas renvoyée pas seule, renvoyée à sa propre image. Il était là. Tangible. Concret.

Elle repoussa les cheveux noirs qui cachaient légèrement sa tempe gauche, certaines mèches tirant affectueusement vers le rouge, tout comme la longue tâche qu'il avait tracé sur sa peau sans s'en rendre compte. Un mouvement pour l'attirer plus près d'elle sans qu'elle n'ait à se lever sur la pointe des pieds, désavantagée par leur différence de taille quelque peu marquée. " Aimerez-vous être découvert autant que vous aimez découvrir ? " Un souffle contre ses lèvres. Un sourire malicieux. Sa main se posa avec la légèreté d'une plume sur son épaule. Le col vagabond l'avait laissée à demie nue. Il avait la peau bien plus chaude que les doigts de la jeune femme.  Elle resta suspendue quelques secondes à ce simple souffle de distance. Cette tension brûlante qui ne se ruait pourtant pas sur elle pour lui arracher sa robe la fascinait autant qu'elle lui dévorait le corps. Complètement nouvelle. Enivrante.

Il ne bougea pas. N'avança pas.

Un léger rire s'échappa sur une brève expiration. Il était tellement... Les lèvres de la jeune femme vinrent chercher celles de Frédéric. Elle souriait toujours lors du premier contact. Douce, elle enlaça sa lèvre inférieure, découvrant sa fermeté ourlée. Une tension s'évapora dans sa poitrine, laissant enfin de l'espace. Un soulagement. Un appel d'air.  Elle l'embrassa une seconde fois, montant à demi sur la pointe de ses pieds. Ses lèvres se firent plus intenses mais pas plus avides. Elle se cambra légèrement, le mouvement suffisant à combler la distance entre son corps et celui du tailleur. Une inspiration frémissante gonfla sa poitrine en une sensation de bien être à lui en faire tourner la tête. C'était ça. C'était exactement ça. Elle en crevait d'envie. Son sourire s'était perdu quelque part en route, entièrement prise par leur échange, et sa main caressait distraitement la gorge du tailleur. La pointe de sa langue vint caresser cette bouche qu'elle rêvait de goûter... Enfin. Se délectant du contact, langoureuse, elle s'accordait à lui et se laissait aller à sa musique.

Galatéa
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Frédéric LaFleur
Maison de la Flamme et de l'Ombre

Si vous n'êtes pas une oie blanche... Alors je ne sais quel oiseau serait assez noir pour me représenter. Un amusement léger et subtile, qui fut oublié aussitôt, tût par un grondement insistant, celui qui prenait le LaFleur aux tripes, lui nouait la gorge et le tenaillait, au point d'en être presque douloureux. Mais... Il se tenait bien, ce petit soldat, malgré l'impulsion, si animale, qu'éveillait en lui la vision de l'Enchanteresse en cet instant. Car, ce Don Juan sans lit fixe, il voyait tant de détails familiers : l'hésitation, dans la vulnérabilité; le doute, devant un désir exprimé; la surprise, devant des fantasmes mis à nu. Déclarer ses intentions clairement, en assumant son désir et son impudence, d'une manière réfléchie et modérée, sans laisser les rênes à des passions non formulées. Qui fait cela ? A sa connaissance, de ce que lui avait raconté plusieurs de ses partenaires au fil des années... Ce n'était pas une attitude répandue. La fuite et ses détours gênés; l'humour pour cacher la timidité; le silence et son avancée à l'aveugle; parfois l’atroce recours la violence, faute de connaître mieux, ou pour mieux cacher sa vulnérabilité... Oui, chaque partenaire était différent, pour le meilleur comme le pire. Et chacun d'eux laissait sa marque, malgré-eux.

Alors, l'attitude de Galatéa ne surprenait en rien le LaFleur. Par contre, le polisson devinait - en partie ? - les troubles de la jeune femme. Tel un papillon - dirait un poète lambda - de nuit, voletant près d'une flamme, irrémédiablement attiré, au risque de se brûler, la sorcière n'avait pas fui, et lui... Tenait bon, savourant ce qu'il voyaut, anticipant ses surprises sans se laisser noyer par ses envies de débauche. Ses envies, ses désirs, si brutes... Heureusement, il avait eu maintes occasions de les raffiner, pour mieux les savourer du bout des lèvres... Et de la langue.

Car, enfin, elle avait fait ce premier pas. D'un regard ourlé il l'avait regardé faire, avancer, ayant une petite inspiration de surprise alors qu'elle le tirait à elle. Il s'était annoncé, il avait attendu... En une attitude aussi élégante qu'il était fébrile, malgré ses belles paroles. Alors, c'est avec la fébrilité d'un noyé libéré du ressac incessant de ses passions, tremblant encore de ne pas y avoir perdu la tête, qu'il la contempla venir chercher son contact, et finalement... Apposer ses lèvres. Rien qu'un début, qui libéra ses membres, sa main libre venant caresser la courbe d'une mâchoire. Après quoi il -

Oh.

Subitement, un râle lui échappa, alors qu'un corps de femme s'offrait contre le sien. La belle concentration du LaFleur tressauta brutalement comme une calèche sur le pavé, alors que, à son grand embarras, Galatéa découvrait de près, à tous les niveaux, ce qu'il avait, plus ou moins indirectement, par ses manières et ses déplacements, dissimulé depuis de longs instants. C'est qu'une partie de son anatomie n'avait pas la même notion de retenue que son esprit. Et... Eh bien, quand il s'était changé, il n'avait pas vraiment penser à un vêtement de nuit qui dissimulerait le bon fonctionnement de sa mécanique. Après tout, il n'aurait dû être question que de magie, non pas celle à l’œuvre à présent.

Comble du comble, le spectre se figea, plus rouge qu'un bleu tout frais, tiraillé par deux vils adversaires : le désir et l'embarras. Bien sûr, le premier ordonnait l'exact inverse du second. Se jeter en avant ou en arrière. Frédéric n'en fit aucun des deux. Non. Ses lèvres échappèrent à celles de la belle, alors que son front, lui, se posait contre le sien. Ses paupières se fermèrent - trop tard - sur son trouble, et ce fut un rire étouffé, puis de plus en plus franc, qui se fit entendre, alors que son torse tressautait sous l'effet d'une pression relâchée. Après une telle démonstration de désir brute, ruinant son effet, qu'allait-t-elle penser de ses belles paroles ? Qu'elles n'étaient qu'un artifice ?

"Ah, pardon, c'est... Hmmmm... Il peinait à reprendre contenance, ses mains s'étant posées sur les épaules de la sorcière, libérant une cascade blanche, sans qu'il ne s'appuie tout à fait sur elle. Un 'partenaire' qui accourt... Alors que ce n'est pas encore l'heure de sa réplique."

Reprenant ses esprits, Frédéric guettait les réactions de la jeune femme, subissant soudainement la cruelle attente du jugement de l'autre, et la morsure d'une peur insidieuse. Un geste de recul, une incertitude... Regarde-la. Une hésitation, il pourrait expliquer... Regarde-la. Mais l'instant... Etait-il perdu ? Regarde-la idiot. Des peurs d'adolescents, voilà ce qui le retenaient. Et l'homme, lui, savait que les fuir, malgré les sirènes de cette échappatoire, était vain. Le plus dur... Était d'ouvrir les yeux.

Les mires pâles se montrèrent à nouveau, et dans un instant suspendu, les doutes du spectre se jetèrent sur la vision de la vérité : un visage troublé et défiant, non ! A la féminité entière, loin d'un rejet de biche effrayée par les réalités d'un corps d'homme. Un miasme de dégoût et de rejet, non ! Deux lacs obscures surplombant des collines rosées, et plus bas... Des armes de perdition. Repoussant ses doutes, Frédéric se raccrocha à ce qu'il voyait, défaisant les doigts lâches de vieilles hantises. Un faux pas n'empêchait pas une danse de reprendre. Il n'y avait qu'à retrouver... Le rythme. Les sensations. Les mots.

"A votre splendeur il me faut rendre hommage... Quoique celui-ci soit un peu trop empressé à mon goût. Doucement, il repoussa Galatéa, un tout petit peu, juste pour rendre un peu moins franc leur contact. Par contre... Son regard n'avait pas cette décence. Je lui préfère... Celui-ci."

Se penchant, ses mains vinrent prendre en coupe le visage de l'Enchanteresse, et c'est avec révérence qu'il s'offrit dans un plein baiser. Ni dévorant ni timide, enveloppant et doux. Où était la passion, dévorante, emportant tout sur son passage ? Pour le LaFleur, elle se trouvait dans cette retenue, cette patience, cette humilité de ne pas s'emparer, pas tout de suite, et de savourer chaque pas sans anticiper le suivant. Prendre le temps de boire, sans engloutir un précieux temps qui serait bien trop vite passé, ne laissant que l'ombre d'un souvenir, telle une image perdant ses couleurs parmi toutes les autres. Alors... Il s'éloigna à nouveau pour mieux la contempler avec un sourire mystérieux, cette femme qui s'abandonnait avec lui. Prenant le temps de graver dans sa mémoire le doux éclat de son visage, éclairé par un humble feu, dans l'obscurité échauffée de son atelier. Puis il se baissa encore, son nez chatouillant la délicate joue, annonçant le chemin des baisers légers, précédées par ses mains qui glissaient sur le peau chaude d'un cou, jusqu'à se poser à nouveau sur le tissu. Joueur, il respira amplement dans la nuque de la sorcière, avant de susurrer :

"Sachez ceci... A vos questions, je répondrai. Toutes vos suggestions, je les entendrai. A toutes vos demandes, je m'intéresserai. Quant à votre interrogation, eh bien... Si vous l'osez... Un petit 'Ah' amusé se glissa entre ses mots. Découvrez-moi."

En écho à son suave défi, il défit avec avec une paresse assumée les premiers boutons du vêtement, pour mieux repousser le tissu d'une épaule pâle. Là, sur le rebord du clavicule, impudent investigateur, le LaFleur explora, se jouant un petit peu plus des sens de sa victime. Car il y joua de ses lèvres... Comme de ses dents, avec une égale douceur à en déchirer les rideaux.
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Allez savoir pourquoi, les hommes accordaient toujours beaucoup d'importance à leur queue. Quand ce n'était pas leur format, c'était visiblement leur état. Après un instant d'incertitude quand elle l'avait senti fuir le baiser pour poser son front contre le sien, Galatéa avait eut la surprise de croiser un trouble encore plus incertain que le sien dans le regard limpide qu'il osa dérober à sa vue... Trop tard. Son visage avait réellement tourné au pourpre cette fois, et elle souffla doucement le sourire qui lui était remonté au coin des lèvres. Il était quelque peu... fiévreux. Il ne s'attendait pas à ce qu'elle saute le pas ?

Restant contre lui, elle respecta la demande silencieuse et pourtant parfaitement clair des deux mains posées sur ses épaules. Une pause. Un moment. Pouce ! Nullement rassasiée et toute l'envie qu'il avait allumé en elle parfaitement visible au fond de ses étranges yeux d'encre, elle en profita pour l'observer. Ses mains revinrent sagement dans son dos sans qu'elle ne s'éloigne, le laissant respirer. Seul son visage recula, délaissant le contact léger de son front pour pouvoir retracer ses traits du bout des yeux, alors qu'il semblait combattre une gêne soudaine et de profondes hésitations malgré son rire. Il avait quelque chose à dire, lui-aussi, finalement ? Parce qu'elle avait avancé là où il ne pensait trouver qu'une fumée qui filerait entre ses doigts ?

Elle ne compris véritablement ce dont il était question que lorsqu'il parvint à l'articuler. Oh... Oh ! Elle se pinça les lèvres pour ne pas rire mais ne put empêcher son corps de réprimer un infime soubresaut dans sa respiration. Il était gêné par son état. Après le jeux qu'ils jouaient depuis déjà un moment et tout ce qu'il venait de lui dire, il était réellement gêné de cette marque inévitable de son intérêt ? Elle se mordit la lèvre, retenant son envie de plonger simplement dans son cou pour le rassurer de ses lèvres pendant qu'il gardait les yeux clos. Les mains toujours sur ses épaules posaient un statut quo et si les choses avaient été inversées, elle lui aurait été reconnaissante de ne pas l'enfreindre.

Craignait-il qu'elle prenne peur et s'enfuit en sentant le ferme résultat de leur discussion à cause du petit nombre d'homme qu'elle avait eut l'occasion d'observer en tenue d'Adam ? Peut-être se voyait-il devenir trop sensible, trop avide, rien que de sentir son corps contre le sien ? Chaque pensée rendait plus attirant ce visage suspendu entre émois et hésitation. Que ce soit par attention pour elle, par excitation, par pudeur, ou même pour une toute autre raison, il était à présent dépourvu de sa superbe assurance. " Vous n'êtes pas fait de pierre... enfin si je puis dire. " remarqua-t-elle sur un ton sibyllin tout en lui laissant le temps de trouver l'envie de la regarder en face. Il n'en était que plus humain, plus accessible et non pas sur cette de haute chaire d'expert en la matière que son précédent discours lui avait attribué.

Enfin, il lui laissa retrouver les éclats de ciel qu'il avait dans les yeux. Les joues rosies par leur échange et frémissante à chaque effleurement de sa part, elle ne se fit l'écho d'aucun des doutes qu'elle y découvrit. Un sourire moins piquant que les précédent lui montait aux yeux. Elle était touchée par sa réaction, qu'elle soit pour elle ou non. Peu encline à se faire plus forte ou plus en contrôle qu'il ne l'était, elle ne put s'empêcher de chuchoter, féline.

- Vous parlez de sport, vous peignez en de longues phrases des plaisirs qui pourraient s'étendre sur plusieurs heures, vous jouez avec mes sens jusqu'à ce que j'oublie tout pour vous embrasser, et vous vous étonnez d'être correctement échauffé ? " Elle humecta ses lèvres noires du bout de la langue. A ses yeux, la raideur qui était venue la surprendre en s'appuyant contre son ventre n'avait rien de mauvaise ou de dégradante. Le goût délicieusement transgressif de mots particulièrement crus se posèrent sur sa langue, lui faisant plisser le coin des yeux. " Je risque de verser dans le cru... Comment le diriez-vous en des mots plus imagés... " réfléchit-elle tout haut. " Hmmm... Tant que vous n'en faites pas usage trop tôt, Mieux vaut avoir trop d'outils à porté de main que pas assez ? ... Non c'était très mauvais. " ricana-t-elle, débordante d'une dérision bonne enfant, peu convaincue de ses propres qualité en terme de métaphore filées lorsqu'elle s'éloignait de celles qu'il avait utilisé. Elle se fichait de la quantité d'outils mais comment dire plus noblement que la sensation de son excitation contre elle lui chauffait le sang ?

Jusqu'ici, l'usage qu'il faisait de sa langue laissait présager le meilleur. Limitant l'empressement, son regard se réchauffait rapidement. Ses lèvres également. Pourtant, il ne lui en donnait qu'à peine assez pour lui laisser l'envie d'y revenir. Elle se faisait toujours un peu féline, un peu mutine, lorsqu'il prenait le temps de l'observer, alors que son contact était d'une chaleur sans artifice. Intense. Les mains de la jeune femme se posèrent sur la taille fine du tailleur pour ne pas tout de suite venir se presser contre lui. Tâche difficile quand il vint l'aguicher, l'agacer en descendant le long de son cou, puis de son col. Elle soupira lorsque les doigts firent sauter un premier bouton.

- J'oserai... " Pas nécessairement tout de suite étant donné le bien être que ses savantes attention laissaient sur sa gorge. Les sensations électriques qui remontaient lorsqu'un effleurement de dents ne laissa rien d'autre qu'une pression joueuse le long de sa clavicule, sans que la moindre perle de sang ne s'y dessine.  Un écart dans sa respiration et elle passait la main sur la nuque de son cavalier pour remonter dans ses cheveux soyeux, son profile en caressant déjà les vagues noirs, une main toujours vissée à sa hanche.

- Vous ne me rendez pas la tâche facile. " soupira-t-elle. Si elle ne parlait pas maintenant, elle avait l'impression qu'elle n'ouvrirait plus la bouche et lui laisserait tout le terrain sonore pour simplement fondre sous ses attentions. La façon qu'il avait de la toucher lui montait à la tête et lui électrisait le ventre. " J'ai l'impression d'être tiraillée entre deux directions parfaitement opposées. " Elle saisit doucement ses mèches noirs, y passant ses doigts tout en les repoussant pour que ses lèvres posent un baiser sur le tour de son oreille, arrivée juste à porté de bouche dans l'exploration dont elle faisait l'objet. Elle ne parvint qu'à en mordiller subrepticement le haut avant qu'il ne bouge suffisament pour la mettre - involontairement ? - hors d'atteinte. " J'ai envie que tu... vous me preniez maintenant. Intensément. Et en même temps... " Une inspiration plus profonde marqua un baiser de plus sur sa peau à vif. Le présent se faisait plus fort que les souvenirs et l'occasion était un fragment de chance qu'elle voulait saisir. Une soif de lui qu'elle voulait assouvir longuement et longtemps. " J'ai envie d'embrasser chaque parcelle de votre corps, d'apprécier chaque réaction. Voir comment vous fonctionnez, ce qui vous plait. D'enfin prendre le temps de...  faire connaissance. "

Cessant de froisser le tissus fluide sur la hanche étroite de l'homme pour en deviner les contours, la main qui ne jouait pas dans ses cheveux vint se poser sur le col sombre. Dans l'espace restreint de leurs deux corps, le bout de son index se posa sur sa peau dénudée juste au-dessus du bouton qui fermait l'échancrure de sa chemise. Le col élargit qui flottait sur l'épaule agréablement dessinée glissa en sens inverse vers une fausse décence au fur et à mesure qu'elle descendait son doigt le long du torse de Frédéric. Petit à petit, la chemise de son déshabillé retrouva des allures de chemise et elle passa les doigts autour du bouton qui défendait encore la pudeur de son porteur. " En commençant par voir en une fois toutes les parcelles de votre corps que ce col m'a laissé deviné. "

Le bouton entre ses doigts sauta de son œillet mais elle ne le repoussa pas pour prendre davantage les devants. Elle aimait trop sentir ses lèvres contre elle et n'avait pas la volonté suffisante pour l'éloigner.

Galatéa
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Entre deux baisers, un petit rire du LaFleur. Voilà que l'Enchanteresse usait de ses images contre lui !... Et cela fonctionnait très bien, lui faisant sentir une once de ridicule. Quoi, il n'était pas un dieu en son domaine ?! Quel affront ! Il lui ferait payer... En tout cas, pour ce qui était de trouver sa propre métaphore... "L'intention était bonne, l'idée... Pas tout à fait." Mais il ne pouvait se moquer très longtemps sans que son émoi ne fasse vibrer son timbre, alors il s'en retourna à sa lente aventure, parsemant une gorge dans son écrin de rouge, de baisers brûlants, faisant sauter un nouveau bouton, descendant encore. Sous ses mains, dans la voie de Galatéa, dans les couleurs de son visage et ses frémissements, il sentait tout l'effet de ses attentions, et il le savourait comme un bon vin, s'enivrant avec parcimonie. A petites gorgées. De minuscules baisers.



Se relevant, Frédéric s'éloigna de sa partenaire, frissonnant pour de nombreuses raisons, y compris une main de sorcière glissant de ses cheveux. S'avançant à pas lents vers l'âtre tranquille, ses mains, cachées, s'affairaient au niveau de son bas-ventre, le spectre détournant un instant les yeux de Galatéa, se faisant silhouette auréolée de feu, sans visage. Dans un murmure de tissu, son bas glissa, révélant ses longues jambes, surplombées d'un humble fessier... Une aguichante vision, mais de courte durée, car son haut, n'étant plus tenu par son pantalon, retomba plus bas que ses hanches, à la manière d'une chemise trop grande. Comme pour accentuer le phénomène, le spectre mis le col de nouveau de guingois. Se retournant enfin, le contre-jour cachant les détails de son expression mutine, il s'allongea sur le flanc à même le tapis, au milieu des couvertures abandonnées. Les vestiges du rituel se mêlaient aux lignes dessinées par les ombres, sur son visage, sur son torse en parti caché. Observant Galatéa, Frédéric attendait avec, peut-être, autant de... Difficulté, pour lui que pour elle. A une once de tissu de l'indécence. Qu'elle l'admire. Qu'elle le désire. Qu'elle mette à exécution ses belles propositions. Et surtout... "Avez-vous froid, Enchanteresse ?"
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Le troisième bouton céda. Le dernier de ceux qu'elle avait défait un peu plus tôt pour le rituel. Pourtant, le contact de la longue main de Frédéric n'avait plus rien à voir. Elle ne plaisantait pas avec la magie. Malgré la proximité physique que les rites demandaient ce n'était pas un moment d'abandon, en tout cas pas d'un corps à l'autre, d'un être à l'autre. A présent elle n'avait rien d'autre en tête que la sensation de sa paume. Le détail de son majeur un peu plus rêche, calleux à force de pousser l'aiguille à travers le tissus. Ses ongles longs qui faisaient un contraste à sa peau, parfaitement taillés, polis au point d'en être doux mais pas moins acérés. Elle aurait même pu prétendre que c'était la cause de sa mauvaise métaphore mais ça aurait été d'une mauvaise foi totale.



- Vous vous dérobez encore ?! " Un écho de frustration gronda dans le fond de sa gorge malgré son sourire plein d'épine. D'un mouvement instinctif, elle rajusta le manteau sur elle et le suivit pas à pas jusqu'à ce qu'il mette réellement une distance d'un bras entre eux pour commencer à se dévêtir, allant même jusqu'à lui tourner le dos. Voir en pied. Avant de toucher. Moins esthétique par certains aspects. Plus par d'autres. Elle embrassa le spectacle en reculant d'un pas de plus. " C'est là que je suis sensée siffler ? " demanda-t-elle, la dérision mutine cachant les accents rauques de sa voix chaude. Il s'étendit, sans qu'elle n'ait fait un geste. Le feu découpait sa silhouette. Elle aimait décidément beaucoup la danse des flammes. ça annonçait toujours quelque chose d'agréable. De beau. De... Tentant en l'occurrence.



L'idée qu'il finisse nu avant elle était absolument charmante. Le regard qu'il posait sur elle lui donnait encore des envies divergentes. Celle d'être admirée, sous toutes les coutures, avant qu'il ne pose de nouveau la main sur elle, ou elle sur lui. Sa question acheva de remonter le sourire noir de la panthère.

- Beaucoup moins. " Des deux mains, elle vint défaire un bouton de plus, Un léger rire de gorge tinta dans l'air. Elle ne lâcha plus les yeux du tailleur. " J'aurai même peut-être un peu chaud. " Une deuxième bouton. Les quelques autres qui descendaient jusqu'à ses cuisses. " C'est dommage, d'ailleurs, j'aime beaucoup ce manteau... " Elle laissa le manteau couler le long de ses bras, révélant sa silhouette en pleine lumière, les différents dégradés de flamme en léchant les contours. Plutôt que de laisser le manteau tomber en taon au sol, elle le rattrapa par le col et l'étendit de tout son long d'un ample mouvement du bras. Dans le geste, ses cheveux blancs s'éparpillèrent un peu et quelques mèches revinrent souligner l'avant de son corps, coulant jusqu'à son nombril et autour de sa poitrine comme des rivières suivant le lit qui leur est destiné.



- Alors ? " Jusque là vrillée dans ceux de Frédéric, elle s'autorisa de nouveau promener son attention plus largement, penchant une nouvelle fois la tête. Mais comme un mensonge reste un mensonge, un frisson désagréablement froid lui hérissa l'épaule, la poussant à s'approcher à pas lents jusqu'à venir s'agenouiller près de lui, toujours sans le toucher. " Cette fois vous ne vous défilerez pas ? ça devient frustrant... " sourit-elle, narquoise, comme s'il avait réellement retraiter pour autre chose que le plaisir de la voir le choisir encore et encore. Revenir à lui, encore et encore. Brûlant toujours plus de le sentir contre elle.

Elle s'approcha de ses lèvres, souffla un éclat de rire tamisé, et obliqua vers son épaule dénudée pour y poser ses lèvres. Un regard à ses yeux clair. Un second baiser sur la ligne de son trapèze. Un nouveau regard dans lequel luttaient les brumes du désir et le scintillement espiègle d'une curiosité canaille. Une liberté revancharde et puérile, reprise sur bien des choses, qui donnaient envie de profité de la vie. Elle vint caresser son nez du sien, dégagea ses cheveux d'une caresse du revers de sa main, et au lieu de se poser sur ses lèvres, obliqua une seconde fois au loin. Cette fois pour plonger dans son cou. Puis s'amuser à découvrir mille et une façons d'embrasser son oreille. " Dites-moi si quelque chose vous déplait. " souffla-t-elle tout bas. Elle suivait ses envies et les avait prononcées avec sincérité jusque là. Il lui faisait tourner la tête, mais ça ne l'empêchait pas de se sentir un peu gauche... ou trop directe. En tout cas, mais comme il aurait fallu. Elle ne voulait pas qu'il reste sur sa faim. Elle était convaincue que ce ne serait pas son cas à elle, même s'il semblait prendre un malin plaisir à interrompre sans cesse la brûlure de ses sens.

Elle redescendit jusqu'à sa clavicule en mordillant un muscle tendu de sa gorge qui se trouvait innocemment à portée de crocs, tantôt trop légère, tantôt trop appuyée. Remonta avec une douceur extrême sur sa pomme d'Adam. Ses mains, elles, après un moment d'immobilisme le temps qu'elle se familiarise du bout des lèvres, s'étaient mis à descendre sur son torse pour défaire un à un les boutons de son haut, jusqu'à ce qu'il ne tienne plus à rien. Ses lèvres remontèrent à la pointe de son menton pour retrouver ses yeux. La sorcière avait l'expression du chat qui vient de manger le canari, tout sourire espiègle... Et pourtant, avec le désir fébrile si facile à percevoir en elle, il aurait pu infléchir ce sourire d'une simple caresse. La paume tâchée de rouge de Galatéa se posa bien à plat sur son ventre, les doigts écartés, se laissant bercée par la respiration de l'homme. Elle inspira profondément et s'écarta juste assez de lui pour regarder son corps pendant que sa main remontait tout doucement jusqu'à son cou pour mieux redescendre jusqu'à son nombril. Le tissus ombrageait encore sa peau, seulement déboutonné.

Ce regard là, yeux noirs ou non, il ne pouvait ni se falsifier, ni se cacher. Dans une longue expiration se percevait un désir brute. " Ce que tu es beau. " Une admiration animale dépourvue cette fois de toute mimique, de tout amusement. Une chaine qui, au lieu d'être arraché pour un temps avant d'être remise, se défaisait maillon par maillon. Elle était vraiment en train de faire ça. Elle était vraiment avec Frédéric ce soir.


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"Vous ne m'avez pas attrapé... Pas encore." Satisfait de son effet, le LaFleur l'était tout à fait. De se jouer de sa partenaire, à force d'assauts et de retraite, de frustration et de plaisir, sans enchaîner jusqu'à un avènement bien trop prévisible. Connaisseur, il avait cette certitude marquée au fond de ses tripes : il y avait tant à découvrir. Ses manières n'étaient qu'une mise-en-bouche parmi tant d'autres. Et pour la prudente Galatéa... Il avait choisi de se faire désirer. De lui faire découvrir délice par délice, pour reculer ensuite, la laissant réfléchir - à peu près - et prendre pleinement conscience de ce qu'il se passait. De ce qu'ils s'offraient l'un l'autre. De ce qu'ils choisissaient de s'offrir. A chaque, instant, à chaque geste, à chaque souffle.

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Fondu au noir




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TW : Erotisme



Jusqu'à ce râle grave d'un délice infini. Jusqu'à ce que l'esprit de la sorcière, purifié par le feu et la fatigue, redescende dans un silence béat. La jambe qui barrait les reins de Frédéric y resta pesamment pour le retenir un peu contre elle. L'autre s'enfonçait dans le sol, tout comme le reste d'elle. Les yeux clos, son corps se faisait lourd et flottant à la fois. Elle était simplement... bien. " Ô mon Dieu... " Elle n'avait pas les mots mais le soleil trop chaud d'une après-midi d'été et la joie simple d'un bonheur incrédules s'étaient donnés rendez-vous dans ces trois syllabes décousues. Aussi essoufflée que lui, le scintillement d'un sourire éclairait son être. Quelques baisés dans son cou. Leurs respirations chaotiques. Seuls les doigts d'une de ses mains bougeaient très légèrement, caressant mécaniquement le dos de son amant. Elle n'avait jamais goûté de pêche mais l'idée d'un fruit précieux l'émouvait. La tête appuyée contre celle de Frédéric, elle rouvrit paisiblement les yeux, cilla plusieurs fois et sourit de plus belle sans le moindre sursaut. Elle était physiquement incapable de se tendre d'une quelconque façon.

De ce qu'elle sentait comme une épaule, elle remonta la main sur un cou, derrière une oreille et sur un crâne pour caresser affectueusement ses cheveux irréels. " Tu ne voulais pas que je puisse voir l'extase dans tes yeux ? " murmura-t-elle, d'une voix qui parvenait à la fois à être éthérée et brisée à l'homme caché contre sa gorge. C'était surprenant mais pas désagréable... La dentelière aveugle se retrouvait à sentir quelques fils et à mieux comprendre le parfum de vent marin qui s'était infiltré dans leurs ébats. Là-bas, dans un reflet surréaliste qu'elle avait du mal à assimiler pleinement à elle-même, son amant existait encore discrètement par les contours que lui donnait ce corps blanc. Son ventre et sa poitrine pressés par un poids invisible. La courbe gironde de ses cuisses brusquement changée là où elle était appuyée contre les hanches fines du tailleur. Elle ne les vit que du coin de l’œil mais l'image faisait forte impression. Elle regarda plutôt à travers lui la roseur de sa propre peau et écouta les battements de son cœur refluer doucement. Le poids de son corps sur le sien lui semblait plus doux que la plus soyeuse des couvertures. " Reviens à moi, s'il te plait. " murmura-t-elle avec une surprenante douceur avant qu'un sourire languide la rende juste un peu joueuse. " Ta chaleur me comble mais j'aimerais profiter encore un peu de la beauté de ton corps, des teintes de ta peau, des traits de ton visage, des subtilités qui traversent tes yeux clairs. " Elle n'avait pas lâchée sa main, leurs doigts toujours entrelacés. Du bout du pouce, elle caressait son revers, distraitement. " Si tu veux disparaitre, attend au moins l'aube. " ronronna-t-elle. Sa voix ne convoyait aucune crainte que ce soit une réalité.

La jambe de Galatéa se retrouva soudain sur un corps bien réel et glissa sur le sol pour le libérer. Elle embrassa sa tempe, touchée par l'étonnement du spectre. Il n'avait pas fait exprès... " Monsieur LaFleur, auriez-vous perdu le contrôle ? " chuchota-t-elle, taquine, toujours sur le fil d'un souffle incertain qui enlevait le moindre sérieux à sa voix. " J'aime ça... " Les sorcières n'avaient aucun pouvoir vraiment instinctifs. Elles apprenaient. Elle comme les autres. Mais elle avait vu bien des débordements émotionnels se traduire en magie. Du rejet. De la peur. De la défense. Alors pourquoi pas cet abandon également ?

- Merci d'avoir respecter ta parole. " Un soupire simplement sincère cette fois. Les filtres et les masques n'étaient toujours pas de retour. Ils n'avaient plus la moindre importance.
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Que crut-il ? Que son amante avait encore l'énergie pour le taquiner bien sûr ! Taquinerie qui n'éveillèrent chez Frédéric qu'un rire essoufflé, de bien heureux à qui l'on chuchotait des beautés, sur son petit nuage. Alourdi, assourdi d'un bien être délicieux plus confortable que n'importe quel duvet. Une chape moelleuse, un cocon de chaleur où il se lovait sans pudeur, chatouillant la nuque de la vilaine de son nez avec une tranquille satisfaction. Il était bien là, à l'étreindre et à l'embrasser. "Ce que c'est doux... Quand tu me souffles ces choses..." Ce délicieux entre-deux, qui précédait demain, et qu'il était plaisant de faire durer... Et puis, le LaFleur comprit. "Oh...!" Redevenant aussitôt visible. C'était un changement évident, si évident qu'il enragea un instant. Qu'avait-il fait ? Quand ? Combien de fois ? Qu'avait-elle...?! Mais son agacement sembla tout à fait futile, fondant comme neige au sommeil d'un baiser, et d'une piquante taquinerie. Le dandy cacha tout simplement son embarras d'une nuée de baisers sur la pommette la plus proche. "Chut, c'est un secret, vous n'avez rien vu... !" Puisque Galatéa en souriait, il ne pouvait s'en émouvoir davantage, son égo bien loin de ses préoccupations de l'instant.

Un soupir le laissa pensif, mais guère longtemps, le temps seulement d'avoir un sourire malicieux. "Ce fut un plaisir... Quoique je ne fus pas avare de mots, et est incertain quant à ceux me valant ce remerciement. Une précision ?" A croire que la question n'avait que pour but de l'empêcher de répondre. S'étant un peu redressé, l'air de rien, il lui ravit ses lèvres d'un langoureux baiser. De ceux qui prennent leur temps, enclin à profiter encore de la chaleur partagée, sous la caresse d'une main chaude sur une joue, dans l'intimité de mèches s'écoulant en rideaux. Mais la mort ne l'avait pas dispenser de respirer, alors le LaFleur, grand seigneur, leur rendit à tous deux leur souffle. Tout juste suspendu entre eux deux, alors qu'il se relevait juste un peu, pour la laisser voir son bleu, tandis que lui... Ce qu'il ne pouvait lire dans ses lacs obscurs, il le devinait à la roseur de ses joues, la courbe de son sourire, le vacillement sensible de ses paupières. "Y a-t-il un plus beau cadeau qu'un désir offert, partagé... Clamé ? Je n'en connais pas. Enchanteresse... Le titre te va bien." Libérant ses bras, délaissant le dos et la main de Galatéa, il vint lui aguicher le cou d'un soupir. "Quoique... Sorcière, tu ne me l'as pas fait oublier. A glisser des prières entre tes louanges... Comme si chaque instant avait mérité une confession..." Nullement religieux, il n'en connaissait pas moins les symboliques, et quoique surprit par ces mots anciens... La sensation de l'interdit avait eu du charme. Un Dieu qui lui, n'a pas passé le portail, si ce n'est dans les mémoires.

Légèrement, il se portait davantage sur le côté, libérant son amante de son poids, pour mieux ouvrir la voie à sa main pour se porter sur une hanche fraîche, la caressant du bout des doigts comme si elle était faite de satin. "Ô mais il le faudra, ô que je me confesse ! Ô Galatéa, écoute-moi, entend-moi, sauve mon âme pécheresse... soufflait-il avec une chaleur irrévérencieuse. Ma tête, je l'ai volontiers perdue quand je t'ai vu, éperdue... Mon corps ne m'appartenait plus quand tu l'as réclamé, exigé... Nous nous sommes touchés, oh que dis-je... Nous nous sommes connus plus intimement que deux cours d'eau se mêlant en un rugissement... Que pouvais-je faire, si ce n'est céder... ? Aux sirènes d'une femme qui ose dire ce qu'elle aime, ce qu'elle veut, sans détourner les yeux... A pareille démone, je me donne bien volontiers, tout entier." Au désir se mêlait l'amusement, de se jouer ainsi de rites antiques, qui pourtant avaient régit des civilisations pendant des éons ! Mais, par delà un portail entre les mondes, dans la chaleur d'une liberté débridée, le LaFleur osait sans se retenir, louant l'amour des corps avec passion. Ô qu'il osait le dire, encore et encore, marquant de ses mots l’instant, en un délicieux souvenir, faisant fi des timides silences, des oublis de convenance. Affirmant et réaffirmant encore les libertés dont ils s'étaient emparées, et qui les étourdissaient encore.
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De douceurs en compliments, Galatéa s'était peu à peu fait plus direct pour signifier à son amant le léger détails qui lui avait échappé. Elle avait profité de la balade, le sentir alangui, l'entendre apprécier les mots qu'elle prononçait. Les baisers lui firent faire patte de velours. " Je n'ai rien vu. " souffla-t-elle à son commandement, son ton laissant traiter que c'était peut-être justement ce qu'il ne fallait pas dire.

- De m'avoir... " Il n'en fallu pas plus pour qu'elle se laisse emporter dans ce baiser qui n'en finissait pas. Son cœur battait profondément, usant de toute la place qu'il pouvait avoir dans sa poitrine, lentement. Le moment s'étira au point d'effacer toute trace du sourire sur ses lèvres. Lorsqu'il leur permit de reprendre une respiration convenable elle vint piquer encore quelques baisers su bout des lèvres. Plus légers. Pour le simple plaisir de faire durer encore le moment. Au troisième un sourire flottant revenait. Au cinquième, elle se souvint vaguement de ce qu'elle voulait tant lui dire quelques instants plus tôt. " Merci de m'avoir écoutée. " Elle soupira d'aise et retrouva ses yeux bleus, passa ses doigts dans ses cheveux noirs. " De m'avoir prise en compte. "

Plus beau cadeau ? A cet instant elle n'en avait aucune idée. Des cadeaux elle n'en recevait pas si souvent et d'une sorte bien moins rocambolesque. Une bouteille d'alcool frelatée. Une chemise. Un fruit à partager. Une robe ? Elle faillit en rire. Mais un désir commun. Une confiance. Un instant de vérité et de plaisir sans ombre, sans lutte, sans douleur. C'était... Un fragment de vie qu'elle n'aurait pas imaginé. Encore grisée, elle gloussa en sentant son souffle dans son cou. Des prières ? Elle n'avait pas eut conscience de dire quoi que ce soit de ce genre, mais l'idée l'amusait. " Quitte à blasphémer, autant le faire avec ferveur... C'est de ta faute après tout. " Peut-être avait-elle tout au plus invoqué le nom de dieu et de quelques saints ? Une sorcière de son acabit devait prendre le plis.

Frédéric se décala et le froid commença à reprendre ses droits sur la peau humide de la jeune femme qui se découvrait frileuse. Elle tâtonna d'un bras lourd pour tenter de trouver le bord de la couverture mais elle était allongée dessus. La voix chaleureuse du damnée lui agaça l'oreille et un sourire de panthère éclaira les lèvres noires. La main qu'il avait lâchée se glissa sous la tête de la sorcière, l'autre venant caresser le ventre du bellâtre, le singeant lui en train de la singer, elle. " Ô doux pêcheur, Dis-moi tout. Apaise ton âme trop lourde. " Elle scrutait son visage, son expression, réussissant à peine à mettre suffisament d'énergie dans sa plaidoirie pour rester dans le jeu.

Elle l'avait réclamé, oui. un sourire béat, un peu bête lui vint au lèvre à ce souvenir. Elle n'avait pas détourné les yeux parce que lui ne les détournait pas et qu'elle avait adoré voir ce qui s'y cachait. Elle tordit le nez. " Voilà que je deviens une démone..." Et pourtant, contrairement à Lilith, elle avait imploré de l'avoir sur elle. Bon Dieu ce qu'il était beau... " Quelle déchéance d'entendre dans la bouche du sombre incube qui vient de me faire découvrir tout un monde de débauche que je ne pourrai pas oublier. Moi une pure et chaste innocente tout droit sortie du couvent. " Elle soupira exagérément et vint caresser ses lèvres des siennes. " Comme repentance pour ton impudeur tu vas devoir prier à pleine bouche. " Elle l'embrassa longuement, profondément, roulant légèrement sur la hanche dans le processus. Ses muscles grommelaient encore du traitement qu'ils venaient de subir. Elle reposa sa tête sur son bras replié, les doigts jouant dans les mèches d'encre. Il s'amusait, le spectre, et elle s'amusait avec lui. L'idée que ses anciennes façons étaient encore si profondément ancrés en elle qu'elles transparaissaient dans un moment si intime la fit glousser de dérision, puis réellement rire.

- Si tu savais, Frédéric... "  Elle le couvait des yeux, moitié matoise, moitié abandonnée. " Je pourrais vraiment te faire récité les prières de rédemption et les Grâces. Je connais des cantiques et des psaumes. Je pourrais même encore réciter la bible je pense. " Mais il fallait avouer qu'elle ne les chantait pas avec le coeur qu'elle venait de mettre dans les louanges qu'elle lui avait faites. Un frisson remonta le long de son bras, le couvrant d'une chair de poule persistante.   " J'avais vingt-trois ans quand j'ai passé le Portail. Galatéa Kryos est bien mon nom de naissance, mais on m'appelait Marie Keyrouz. " Elle eut un rictus, s'attendant à le voir rire à plein poumons. Elle précisa. " Sœur Marie Keyrouz. J'avais prononcé mes vœux. Je vivais dans un couvent orthodoxe près d'Athènes. Je portais le voile depuis presque cinq ans. " La main qui caressait la joue de Frédéric avec la douceur d'une plume retomba un moment sur son ventre, remontant avec un contentement lascif vers sa poitrine. " Alors il est bien possible que quelques fragments de cette ancienne vie de dévotion soient venues se glisser sur la langue de la Sorcière que je suis devenue... Peut-être sous le coup d'une sorte d’indicible extase. "

Elle rit encore un peu, sa main passant du renflement de son sein à la courte toison qui tapissait élégamment le torse du tailleurs. Le feu avait réduit pendant leurs ébats et le crépitement se faisait plus bas, la lumière plus rougeoyante. L'une des jambes de la belle vint s'appuyer contre celles du tailleurs. " J'imagine que la vie d'un médecin devait être toute autre. "

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Prier à pleine bouche... Si un évêque des temps anciens avait eu connaissance des images que ces mots firent naître en l'esprit du LaFleur, le pauvre homme aurait filer en isolation pour quelques jours. Frédéric, lui, se plia bien volontiers à la 'requête' de l'Enchanteresse, le souffle rieur alors qu'ils s'adonnaient tous deux à une odieuse embrassade intimiste et consentante, en dehors des rites du mariage. Des concepts révolus pour le libertin, dont l'évocation ne lui insufflait que l'envie d'en jouer toujours plus, dans l'exagération et la débauche. Libre.

Quelle ne fut pas sa surprise aux révélations de 'Soeur Marie Keyrouz' ! Avec des yeux ronds, il écouta religieusement, presque atterré que ce mode de vie, archaïque à ses yeux, ait survécu jusqu'aux derniers temps de leur monde moderne et mourant. Pourtant, il n'en rit pas, quand bien même la belle ne faisait que confirmer son fol jeu : il avait participé à la corruption d'une dévote ! Mais à cette charmante idée s'opposait la précieuse découverte... Car tous ne parlaient pas volontiers de leur ancienne vie. Par peur de représailles, pour s'en libérer ou encore se détacher complètement de son ancien soi ? Dans tous les cas, il demeura songeur, sur un coude, contemplant la tentatrice dont la main n'avait de cesse de le parcourir négligemment. Si loin de son couvent...

"C'est pour cela... Que tu portais si bien un long manteau... réalisa le tailleur, se rappelant des expositions de vêtements religieux indécents de tissus et de broderies. ...Et que le cérémoniel te vient si naturellement. Sorcière..."

Taquin, un long doigt vint glisser sur les marques troubles ornant à présent les charmes de Galatéa. Glissant entre deux monts, prenant des détours semblables à un chemin de montagne, jusqu'à un sommet qu'il vint aguicher. Si réel, si présent, que cette voie sur une peau satinée, qu'hérissait son touché d'un léger frisson, bien loin d'une vie qu'il ne parvenait guère à imaginer. Et puis, quand son attention se tourna vers lui... C'eut été si aisé que de lui dénier sa curiosité, pour la repousser d'un nouveau jeu de mains indécents. Il en connaissait bien d'autres, qu'il eut été bien plus plaisant de lui faire découvrir... Le cacher, n'est-ce pas lui donner du pouvoir ? Celui d'être évoqué à mon insu. Il ne parvint pas tout à fait à se décider.

"Différent sans doute... Que je ne regrette pas, certainement. Les paupières à moitié closes, le LaFleur soupira, semblant s'abîmer dans l'admiration de la peau de son amante. Plus d'une décennie d'études, à emmagasiner des monceaux de connaissances, alternant théorie dans des amphithéâtres avec projection et révision jusqu'à des heures indues, et pratiques dans des services surchargés... De la paume, il vint l'oppresser un peu, ses doigts des serres paresseuses la piquant à peine. Des nuits trop courtes pour des esprits imbibés et essorés sans cesse, de fatigue et d'apprentissage. De longues périodes nébuleuses, où j'ai fait plus que je ne me souviens, sans doute. Et certains souvenirs qui étaient devenus des regrets fades. A mes études, ma famille m'arrachait parfois, pour l'une de leur absconse réception. As-tu déjà eu ce sentiment, de suivre aveuglement des rituels ne t'important guère, davantage pour autrui que pour toi-même ? Y mettant ce qu'il te reste d'énergie alors, qu'au fond... Cela t'importe peu ? Une torsion de sa bouche, peu appréciatrice. Préférant revenir au présent, il montra un beau dévouement à explorer la gorge de la beauté face à lui, sa mimine s'aventurant plus bas. Point d'interdit sacré, si ce n'est d'aller en salle d'opération sans tout un ensemble de protection..."

Mais son aventure en une peau délaissée par leur caresse lui fit réaliser que le froid, lentement, gagnait du terrain. La dureté d'un monde dénué d'un 'banal' chauffage global, garantissant à toute heure une température constante, réglable d'un simple mot à l'intention des technologies connectées gérant le moindre détail de l'habitation. Présentement... La technologie connectée, c'était lui. Faite de muscle pour soulever le bois et de capteur sensoriel pour lui signaler le froid. Banale humanité.

"Ou nous nous sommes refroidis, ou la pièce n'est pas suffisamment chaude... souffla-t-il en suspendant sa progression. Le second, sans aucun doute."

Brusquement, il eut encore plus froid. S'étant relevé, il tendit à Galatéa la seconde couverture répandue à leur côté, avant de mettre une nouvelle bûche au feu à grands pas. Repoussant ses cheveux, le LaFleur souffla pour raviver les braises, pour qu'elles mordent vivement la nouvelle venue... La soudaine attaque de la chaleur sur son derme encore humide le fit frissonner, son torse lui semblant aussi chaud que son dos était froid. Traîtresse, la fatigue en profita pour se rappeler à lui, alors que nu, accroupi, il contemplait les flammèches renaissantes avec une fascination hébétée.

"J'ai découvert comment allumer un feu en arrivant ici. songea-t-il tout haut. Heureusement que je n'ai plus faim, car il m'aurait fallu bien des professeurs pour ne pas m'intoxiquer en m'occupant de la cuisine. Un confort archaïque, une perte d'énergie et de temps immense dans les tâches les plus simples... Il soupira, ajoutant avec dérision. C'est idiot tout de même... D'avoir besoin de mourir et de se perdre dans un autre monde pour apprécier de..."

Comme surgit du passé ravivé par ces évocations, un hameçon s'accrocha en son cœur et lui ravit ses mots. Un soupir lourd, c'est tout ce qui parvint à franchir le poids de ses lèvres, alors que les braises l'hypnotisaient de leur lente pulsation.

"Si idiot..."
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Il n'avait pas rit. Ni à l'évocation de ce nom grotesque et difforme qui avait été le sien pendant des années. Ni à l'évocation des rites, des cantiques ou du voile. Elle s'attendait à ce qu'il s'en amuse et pourtant elle lui était reconnaissante de ne pas prendre ses mots pour de simples plaisanteries, comme d'autres l'avaient fait. Elle ne cachait pas son passé, il était trop lié à ce qu'elle était et ce qu'elle s'efforçait de devenir pour le renier. Elle préférait l'embrasser et le transformer. Mais elle n'en parlait pas si souvent, tout simplement parce que cela ne venait pas dans la conversation, ou pas d'une façon agréable. Parce que les gens ne lui posaient pas de question. Peut-être aussi que pour la plupart, elle n'était rien avant cette silhouette blanche aux yeux noirs. Une sorcière qu'ils ne pouvaient imaginer autrement que tremée d'ichor et entourée d'amants.

- Tu trouves vraiment que je le portes bien ? " sourit-elle, agréablement surprise. Sur le moment, son appréciation aurait tout aussi bien pu faire parti du jeu, de l'envie du moment. Mais il le disait à présent comme une vérité fraiche et légère. Même par rapport à d'autres femmes, elle l'aurait bien porté. Elle leva un sourcil à l'appellation Sorcière. Il avait une façon de le prononcer, presque aussi délicieuse qu'Enchanteresse. " Que ce soit pour invoquer les anges ou les démons, il faut en passer par beaucoup d'apprentissage. Des choses plus ou moins méprisables. Plus ou moins belles. "

Elle soupira de contentement en sentant sa main sur elle. Un contact précieux. " και τα δύο θα γίνουν ένα. Δεν είναι λοιπόν πια δύο, αλλά μία σάρκα. " susurra-t-elle, les accents de sa langue natale roulant naturellement sur sa langue avec ce phrasé chantant des textes travaillés. Elle le regarda un instant, féline, le bout de ses doigts venant caresser l'angle de sa mâchoire. Seule la pulpe de son majeur redescendit le long de sa gorge, suivant sa courbure. " Et les deux deviendront un. Ils ne seront plus deux, mais une seule chair. Évangile selon Saint-Marc, Chapitre 10 verset 8 " Des mots pris soigneusement dans des centaines de pages, qui auraient pu être dédiés à bien des choses d'en haut comme d'en bas. Elle laissa passer les souvenirs, amusée, pour s'intéresser au présent. Ses lèvres se fendirent d'un 'doucement' silencieux lorsqu'il arriva au sommet de sa route, avant qu'elle ne s'intéresse à ce qui avait pu faire du tailleurs ce qu'il était aujourd'hui.

Il était riche, elle le savait déjà. Mais il n'aimait pas son ancienne profession de médecin, c'était criant. Le vague à l'âme qui pointa à l'évocation de cette autre vie, en revanche, elle ne s'y attendait pas vraiment. Il avait toujours l'air si éclatant et sûr de lui. Voilà qu'après l'honnêteté concernant sa gêne et son trouble, il confiait un peu de ses regrets. Lui laissant libre accès à son corps, elle caressait lentement sa gorge et la naissance de son épaule, bouclant en arabesques hasardeuse, de sa pomme d'Adam à sa nuque. L'autre main toujours sous sa tête, elle appréciait ses caresses, indolente. Elle le regardait plutôt, pendant qu'il parlait. Les fluctuations de son visage lui donnaient cette folle impression qu'il observait des souvenirs projeté sur la pâleur de sa peau. La médecine. Les jours trop longs. Le fardeau trop lourd. Le carcan de sa famille dont il ne partageait pas les valeurs. Elle passa les doigts dans ses cheveux noirs, les glissant derrière son oreille en un geste plus intime, sans l'interrompre.

Les lumières des porte-containers sur le fond noir de l'eau. L'odeur de vase et la brise chargée de cette âcre odeur de fumée portée par des flots vidés de toute vie. Le froid humide du banc sous elle. Toujours le même. Celui sur le port de commerce. Un détour infime entre le couvent et la boutique de leur fournisseur. Sa seule fenêtre pour respirer depuis que sa bourse avait été refusée. Elle s'était fait une raison, convaincue que sa vie lui plaisait, qu'elle pouvait faire contre mauvaise fortune bon cœur. Que de toute façon, elle n'avait pas d'autre voie à suivre et que d'ici deux ou trois ans, il ne resterait d'elle que des souvenirs.

Et pourtant, même en ce temps là, elle retardait toujours le moment de repartir et pour les jours à venir, il faudrait reprendre le joug. " Mettre le costume qu'on nous demande de porter et entrer en scène parce que les choses sont ainsi. Et peut-être qu'avec un peu d'espoir et de temps, un jour prendra sens. " murmura-t-elle tout juste en une forme d'acquiescement. Elle n'avait peut-être pas assisté à des réceptions, mais ce qu'il décrivait, elle le connaissait bien. Oui, elle en avait eu l'impression de tout donner pour les autres et bien plus d'une fois. Être celle dont certains avaient besoin. Se sacrifier à la demande. Participer à des rites qu'elle finissait par ne plus comprendre. Son pouce caressa la bouche sensuelle qui venait de se tordre, pour en effacer le rictus déplaisant.

Il ne poursuivit pas plus longtemps dans les souvenirs les plus lourds pour lui, revenant à leurs jeux impies. Dans les houles des émotions qui passaient en vagues plus ou moins vives, elle était comme chez elle... Et elle ne pouvait pas s'empêcher d'en admirer le flux et le reflux.

Le geste suspendu la contraria légèrement... Mais d'un autre côté, elle n'avait vraiment pas chaud. Elle saisit la couverture, et commençait à l'étendre sur ses jambes, attendant qu'il revienne. En pure perte. Il s'occupait du feu. L'éclat sombre de son profile nu étalait toute une scène luisante sur laquelle les flammes dansaient en mouvements vifs et langoureux. Hypnotisé par les braises, elles se reflétaient dans ses yeux, masquant leur clarté. La Flamme et l'Ombre dans son aspect le plus brute. Une gravure vivante lui faisant une fois de plus penser qu'Enos et Eros n'étaient pas tant éloignés que ça.

Deux bras entourèrent les épaules de Frédéric. Deux mains se posèrent sur son torse. Une bouche vint embrasser son cou. Une poitrine encore érigée par leurs plaisir commun se posa contre son dos, un ventre tiède contre ses reins. Une agréable chaleur irradiait d'un corps à l'autre.

- Comme beaucoup d'entre nous. " Elle souriait. Sans prendre ses mots à la légère, elle ne leur laissait pas la lourde gravité qui pesait sur les épaules du spectre. " Mais aujourd'hui, tu es ici. "murmura-t-elle avec une douce chaleur. Son nez vint caresser l'angle de sa mâchoire. " Rien n'a pas besoin d'être lourd. Ce que tu as appris à apprécier. Ce que tu vois dans ces braises... Ne les refuse pas, s'il te plait.

Qu'il se perde dans les échos d'un passé lointain ne la gênait pas. Ils avaient tous erré dans les limbes d'un entre-deux. Certains pendant des mois, d'autre des années. Mais la curieuse sorcière ne pouvait pas simplement oublier d'être elle-même. Avide. Gourmande. Elle aurait pu le ramener sans un mot, chasser cette brume de quelques bons mots. Elle aurait pu... Mais elle avait trop envie de savoir. De découvrir cet être unique qui avait partagé son corps et qui était aussi celui qui avait le moins partagé sa mémoire. De lui dire, aussi, que bloquer et cacher les déconvenues de son passé était le meilleur moyen pour continuer à en souffrir encore et encore. Elle en avait tant vue, des regrets et des remords. Ils portaient des noms, des regards, des espoirs. Lorsqu'ils arrivaient chez elle, ils faisaient souvent les pires choix, mais elle n'avait pas à le laisser s'enliser ce soir.

- Dis-moi... " Elle embrassa sa joue et tourna la tête vers le feu, l'appuyant contre celle de Frédéric. "  On en rira dans un moment et elles perdront leur emprise. " Deux doigts se promenaient, marchant malicieusement vers sa clavicule. " Et puis j'aime te découvrir. "

Galatéa
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Frédéric LaFleur
Maison de la Flamme et de l'Ombre

Un indicible frisson accueillit le contact de la chair de Galatéa contre son dos nu. Nul vêtement pour s'en faire rempart, aucune hésitation dans les bras qui l'enlacèrent, et la voix qui vint lui susurrer l'abandon, alors qu'encore un instant plus tôt, c'était des mots saints qui en franchissaient les sombres lèvres. Un autre monde, des êtres changés, des vies qui ne se seraient sans doute jamais, autrement, croisées. "N'est-ce pas l'attitude d'une démone... Que de se faire sentir ainsi... Tout en restant hors de portée de mes doigts... Éveillant mon désir sans pour autant m'en délivrer ?" Un sourire las, à l'amusement endormi. Loin de s'en défendre, le spectre porta l'une des mains tâchées de rouge à son visage, pour en embrasser la paume, tout en mêlant leurs doigts. Si réelle, fraîche et chaude à la fois, d'une presque inconnue dont il connaissait davantage le corps que l'esprit. Si loin de ses premières décennies. Irréelle.

Aussi irréelle que la limite sur laquelle il se sentait danser. La distance qu'il était nécessaire de maintenir, pour cette étrange équilibre de danseur des corps. Rien que des moments passagers n'est-ce pas, pour qu'il reste libre d'offrir et d'apprécier. C'est bien ce qu'il avait énoncé, et qu'elle avait accepté. Mais l'entente était belle, le contact doux, et la demande raisonnable. Le froid du recul lui était en l'instant une bien cruelle perspective, à l'inverse de l'envie de fondre dans cette étreinte, où elle avait toute liberté de jouer avec lui. Une qui en a l'audace... Et qu'il ne désirait pas arrêter. Si idiot. Il sentait le jugement de vieux fantômes, et souhaitait d'autant plus céder, pour les défier. Son être, enivré de passion, n'aspirait pas à la prudence. Davantage à l'abandon. Pour vivre autrement cette nouvelle vie et se défaire, choix par choix, de l'ancienne.

"Soit. Une reddition, sans grande lutte. Imagine... souffla-t-il, dénué des pouvoirs des chimères, si tentant en cet instant. A défaut, il devrait se contenter de mots, plutôt que d'images. Un ballet d'individus s'observant avec calcul... Choisissant avec qui parler pour une raison, qui toucher avec préméditation... Un costume, dis-tu ? Un que l'on se met à porter à tout heure, avec tous... Car ses propres parents ne se rappellent plus comment en être dévêtu. D'entre les doigts qu'il tenait précieusement contre son visage, Frédéric regardait les flammes onduler à leur rythme mystique, mais semblable à ce qu'il avait vu dans l'ancien monde. Avait-il alors contempler un vrai feu ? Ou seulement une rediffusion, d'un éternel foyer enregistré dans la matrice, aux couleurs en haute définition, dénuées de l'odeur du bois et de la cendre ? Un costume qui te définie davantage que tu ne le modèles, que tu portes en te disant, qu'un jour, il ne sera plus nécessaire. Sans que ce jour ne vienne jamais, malgré les années, les décennies. Les autres sont des pions, des camarades de passages avec leurs propres plans. L'attachement y est un jeu de pouvoir et de faux semblants, risqué. Aucun ne mérite jamais de prendre le risque de se découvrir. Et, le plus ridicule de tout cela, de toutes ces facéties d'aristocrates... Son autre main, à l'aveugle, vint s'égarer le long de la hanche du corps plaqué contre le sien, glisser le long d'un galbe à la douceur de nuage. C'est que je n'imaginais rien d'autre."

Un mode de vie à part entière, si lointain et pourtant qui avait été son monde pendant plus de trente ans. De l'enfant docile à l'adulte réservé, suivant les pas présentés comme les 'meilleurs', les 'gagnants', ceux lui assurant un avenir radieux dans un monde à la terre pourrie et à l'air viciée, en dehors des bâtisses précisément maintenues pour leur seul confort. Des bulles à l'écart du reste d'un monde en perdition. Une chance, une aberration ?

"Alors, quand le hasard m'a fait trouvé non pas une, mais deux clés... Un murmure révélateur, aussi bas qu'il enflait du poids de la révélation, des possibilités soulevées par ce hasard improbable. Une clé pour mon salut, une autre pour, quoi ? M'assurer un départ en fanfare en la revendant ? Emmener avec moi un allié, une âme damnée, ou pire, un parent ? Tout contre l'Enchanteresse, le spectre se raidissait à ce souvenir, un torrent si vivace d'émotions comme il n'en arrivait qu'une fois dans l'existence, avait-il cru. Parmi toutes les possibilités, c'est la moins probable qui s'est imposée à moi. Celle qui avait un goût de conte, de déraison, de bêtise d'enfant..."

Le ventre tordu, offert aux flammes, Frédéric ressenti soudain une terrible soif, qui lui assécha la bouche, la gorge, lui donna envie de se recroqueviller, ou si Galatéa n'avait pas été dans son dos, de l'enlacer follement, et de cacher dans sa nuque et ses cheveux, la figure qu'il sentait devenir son visage à son insu. Limité par sa posture, tenant prisonnière l'une des mains de la sorcière, il tourna la tête et plongea du mieux qu'il put dans sa nuque et ses mèches pâles et folles, l'attirant à lui de son autre main, sans parvenir tout à fait à le cacher : un regard triste et perdu, confus d'avoir dévier à l'instant fatidique de ce qui l'avait pousser à avancer toute sa vie, taraudé malgré le passage du temps par l'incertitude et le doute, pour un choix parmi tous les autres. Et avec cette élan, cette histoire, le LaFleur ancien élève studieux de bonne famille, se força à aller jusqu'au bout, et à énoncer de ces secrets que certains pourraient garder jusque dans la tombe. Pourquoi à elle, pourquoi maintenant ? S'il prenait la peine d'y penser, il se tairait sans doute. Peut-être à jamais, lui semblait-il.

"... Je l'ai donnée. Ce n'était pas assez. A quelqu'un que je connaissais à peine. Étudiante en médecine elle aussi, mais évoluant en dehors des affaires des grandes familles. C'était un mensonge, en partie. Qui osait ne servir que des demi-vérité à une Enchanteresse ? Un rire, maigre et amer, qui le força à compléter. Je la connaissais suffisamment... Pour être attiré. Sans l'avoir jamais touché, en voyant simplement... Son désintéressement, sa vulgaire bonté, un rire qui ne cachait rien... Une vraie personne, ou l'idée que je me faisais d'elle ? Je lui ai seulement forcer les mains d'une clé, sans rien demander, sans rien formuler, avant de m'enfuir de ce monde. Imbécile. J'aurais dû parler. Un soupir grinçant, alors que d'une main il reprenait conscience, en suivant du bout des doigts, ce qu'il devinait être une pommette, et juste au dessus, le lit d'une paupière. Si réel. Un doute stupide, vraiment. Je lui ai fait don de mon silence, et me suis damné avec cette question : viendra-t-elle ? Une question qui en cachait tant d'autres. J'ai découvert une intensité dans ce monde-ci, des plaisirs à se damner... Un baiser doux, qui ne pouvait tout à fait dissimuler l'attente craintive dans ses yeux bleus. Pourtant cette ombre demeure. D'une question jamais posée. Un faux amusement, qui se forçait à être léger. Futile, n'est-ce pas ?"

Dans l'attente, le libertin se sentait fichtrement nu. Enlacé, ne reprenant nullement l'ascendant sur son amante, il souhaitait tour à tour qu'elle taise ses questions du baiser de l'oubli, ou entendre au plus tôt ses pensées, et qu'il l'embrasse ensuite, et l'enlace et la fasse crier d'extase, pour la faire oublier tout autant ce qu'il avait finalement révélé, sur son passé de richard fantoche. Sa vulnérabilité le laissait frémissant et incertain, attendant son prochain geste, ses prochains mots. Grisant... Et terrifiant à la fois.
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Lorsqu'il avait entremêlé leurs doigts pour amener sa paume jusqu'à ses lèvres, le silence s'était fait. Soit, elle serait une démone... mais elle doutait que ce soit à cause de ses bras autour de lui qu'elle méritait le plus ce titre. Le désir, il avait prouvé à maintes reprises qu'il savait danser avec lui et s'en amuser. S'en griser. Au moins, l'idée d'être à son niveau sur ce point n'était pas pour lui déplaire. Mais la sorcière, la démone, assumait surtout ce titre par habitude. Qui prête une oreille attentive et voit derrière les masques en recevait souvent le titre. Elle ne se défendit pas plus qu'elle n'acquiesça, ne lui donnant aucun moyen de saisir la conversation pour la mener sur d'autres rives avant d'avoir fait son choix. Elle écoutait, attentive. Ses idioties ne seraient pas pire que les siennes ou que celles des autres.

" Soit... " Elle l'attira en arrière, qu'il ne reste pas tendu, recroquevillé sur lui en suspend sur ses talons. Elle l'accompagna plutôt au sol pour qu'il s'asseye sur le tapis, calé entre ses cuisses, appuyé contre elle. Elle lui était acquise, ses mains suivant les envies du spectre. Du bout du pouce, elle caressait le côté de sa grande main.

Elle avait plutôt l'imagination fertile, mais manquaient les références que beaucoup considéraient comme acquises. Les livres et les holos qu'elle avait pu suivre se comptaient sur les doigts des mains. Les calculs et la préméditations, les entrelacs politiques de diplomatie en alliances, elle ne les connaissait que par ses cours d'histoire et de géographie actuelle. Les réceptions et les rencontres mêlaient dans son esprits des vêtements désuets et grandioses comme Frédéric en créait et la froideur calculatrice des plans ourdis dans l'ombre. De fausses séductions. De la main mise et du pouvoir.

De solitude.

Quelque chose qu'elle n'avait jamais réellement connu. Pas sous la forme qu'il exprimait, lui. Elle avait été seule face à l'illusion d'un groupe. Il avait été seul au milieu de gens seuls. Cette protection de soi face à un monde qui n'inspirait plus confiance, elle la connaissait. Et vivre sans personne qui mérite qu'il parle de lui avec honnêteté... L'entendre de sa bouche alors qu'il était justement en train de se laisser découvrir fit un drôle d'effet à la jeune femme. Flattée et pourtant quelque peu... Elle ne savait pas trop quoi. Une retenue sans doute.

Elle l'écoutait. Sentait sa raideur. Profitait de ce repos où les phrases se faisaient plus cassantes. Son souffle plus lourd. Les tracés pensifs de ses doigts sur elle plus abstraits. Deux clefs... La tête posée sur son épaule se redressa pour le regarder avec étonnement, un bref souffle amusé passant ses lèvres. Décidément, certaines personnes étaient décidément faite pour attirer la profusion de biens, même lorsqu'ils étaient aussi aléatoires et précieux que les clefs d'or. Et comble de l'ironie. Deux clefs était venu au seul homme qui n'avait personne à qui la donner. Enfin peut-être pas ?

Son conte de fée, sa bêtise d'enfant, elle la lu dans le silence de sa respiration avant même qu'il ne tente de se cacher à demi dans son cou, la rapprochant plus encore de lui en la poussant à se surélever un peu pour l'entourer davantage. Il avait donné la seconde clef à une femme et de toute évidence elle n'était pas arrivée jusqu'à Ozena. Ce ciel d'été où brillait une détresse troublée le lui confirma. Qu'il était déplaisant de voir un tel visage marqué par la tristesse ! Elle caressa ses cheveux, mêlant sans y prendre garde le blanc et le noir dans leur étreinte serrée.

C'était pour ça qu'il avait hésité. Parler d'une conquête à une autre n'était pas chose facile, en tout cas elle l'imaginait. Plus exactement parler de l'élue à celle qui compte, mais pas tant que ça. Elle fronça les sourcils, chassant le réflexe grotesque de se comparer à qui que ce soit. Quelle drôle d'idée. Il n'était pas question d'elle. Il n'était jamais question d'elle. Elle le savait et elle le pratiquait depuis des années. Ici ou ailleurs, chacun n'était fidèle qu'à son propre cœur et n'agissait que dans l'espoir fou de saisir un instant de bonheur. Les choses n'avaient pas à être différentes ce soir.

Plutôt que de l'éloigner pour pouvoir le regarder dans les yeux, elle le laissa se nicher dans ses cheveux défaits et emmêlés par ses soins, plus contre son profil que vraiment dans son cou. " Une étudiante inconnue... " laissa-t-elle trainer sans poser de réelle question, certaine que c'était faux. Il fallait plus qu'une inconnue pour un conte de fée. Et en effet, il y avait eu plus que ça. Des espoirs fous. Une porte ouverte sur un autre monde avant même de passer le portail. Ce genre de courage dément que donne la certitude d'une fin imminente.

- Futile ? ... Rabaisser ce qui est important pour toi ne te va pas au teint. " souffla-t-elle avec un rire sincère dans la voix. Elle avait toujours le goût de ses lèvres sur les siennes et un sourire au coin de la bouche. " Pour hanter un fantôme, cette femme devait être extraordinaire. " Les yeux clos pour laisser les doigts du conteur s'y promener, elle embrassa sa joue trois fois, s'approchant peu à peu de sa commissure.  " Généreuse... Bienveillante... Émotive... Tout le contraire de ce que ton monde avait a offrir, visiblement. " Tout ce qu'il ne pouvait être à cette époque. " Tu l'as suffisament aimée pour garder son nom gravé dans tes pupilles, même des années plus tard... " Elle s'écarta juste assez pour tenter de voir ses yeux clairs. Du pouce, elle vint souligner son œil avant de laisser la main qu'il ne tenait pas glisser sur son torse à son ventre. Face au trouble craintif qu'elle lisait dans ses yeux, elle dévoilait sans en avoir entièrement conscience une malice attentive aux discrètes fluctuation.

Si impacté par un souvenir qu'une part de soit en restait prisonnier... La coupe inconfortable d'une chemise mal adaptée lui traversa l'esprit sans qu'elle ne s'y attarde. Ce n'était pas à elle de vouloir qu'il guérisse de tout cela ou qu'il la garde au cœur jusqu'à sa mort. Il avait son idole de marbre comme elle avait eut la sienne. Facile à aimer. Facile à haïr. Faite uniquement de ses propres espoirs et de ses rêves fous. Vouloir l'aider était futile. Chaque personne faisait ses choix pour elle-même et les chemins ne pouvaient être que montrés. D'autant plus qu'elle n'était pas avec un client, mais avec un... Une pointe d'incertitude lui taquina le cœur et elle s'en détourna. Pas maintenant. La seule chose importante pour le moment était la sensation du satin halé que caressait sa paume et la curiosité qu'il lui inspirait. Elle serra tendrement ses doigts.

- Si elle arrivait demain, tu n'aurais pas peur que la réalité ne soit pas à la hauteur de ton imagination ?

Cette idée fabuleuse qui lui collait à l'âme, aurait-elle encore le moindre intérêt si elle devenait réelle ? Si elle n'était pas d'accord avec lui, le mettait face à ses contradictions, lui montrait ses propres défauts, ses propres manquements. Aimer un souvenir était facile. Sans risque. Aimer au présent n'apportait rien pour peu que sa vie soit comblée. Mais s'il se trouvait à regarder le feu en regrettant de n'avoir pas oser se montrer tel qu'il était, il fallait peut-être qu'il se souvienne qu'elle n'avait aucune réalité. Voilà ce qu'elle aurait voulu lui dire. mais à quelle fin ? La main pâle remonta caresser son épaule, lâchement enroulée autour de lui comme une écharpe. S'il chérissait son poison, libre à lui... Et pourtant, elle continuait, contre toute raison.

- Et si elle reconnait l'homme timide derrière le prince d'ombre et d'envies qui tu est devenu, j'imagine que cette fois tu ne la laisserai pas filer sans l'avoir touchée...

Elle n'arrivait pas à lâcher le sujet, le laisser se terrer à nouveau, soit disant hors de vue alors qu'il était là avec eux. Le recule ne lui venait pas comme lorsqu'elle parlait à des inconnus de leurs problèmes les plus intimes. Malgré tout, elle avait envie qu'il se sente bien et s'était laissée attendrir par la vulnérabilité dans ses yeux. La vérité dans sa voix. Il méritait le respect mais elle naviguait à vue. Leurs corps entrelacés entouraient sa clairvoyance d'une brume chaleureuse. Elle l'embrassa au creux du cou.

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