Décembre 10, 118

Le retour dans l'échoppe de Lafleur avait été une agonie. Un peu calmée, toujours aussi proche d'imploser, Amelia s'était laissée traîner à l'intérieur par l'assistante champignons, sans un mot, laissant libre court à la frénésie du spectre qu'elle avait désormais en horreur. Les ibouris accueillis, Amelia se sentait peu ou prou comme un chien dans un jeu de quilles, laissant LaFleur faire sa besogne tandis que son regard noirci de rage se posait parfois sur Eos. Qu'est-ce qu'il venait de se produire déjà ? Ah oui, bien trop de choses pour que la cervelle de moineau puisse suivre. Et une fois fichus dehors manu militari, Amelia se trouve là, le manteau d'Eos dans une main, un pull dans l'autre, bien bête. Elle avait voulu s'enfuir, pourtant elle était toujours là, qu'est-ce que ça signifiait déjà ? Mais pas le temps de continuer à essayer de réfléchir, car la tempe du doc se pose contre son épaule et la vampyre reste silencieuse. La ville avait une drôle d'allure ainsi couverte de neige et finalement, tout le monde restait chez soi. Avait-elle toujours un chez elle ? Non, probablement pas.

« Oui, rentrons. » Rentrons continuer cette conversation douloureuse, se briser un peu plus le coeur et faire grandir la haine dans le palpitant de la vampyre. Après tout, on risquait quoi ? Sans même avoir eu le temps de passer un bras derrière les épaules fragiles d'un doc aussi épuisé qu'elle, Amelia avance, Grouik sur les talons qui s'inquiète toujours de la langueur de sa maman adoptive. L'ibouris ne connaît que trop bien cet état, celui qui avait poussé la jeune femme à le remettre à son amie Nelly et à disparaître pendant des jours loin de tout ça.

Les bras toujours chargés du manteau, Eos s'arrête rapidement, coupant l'hébétude de tout le monde en demandant de l'aide pour s'habiller. Sans plus attendre, Amelia jette le manteau sur ses épaules, l'aidant à enfiler la seule manche dans laquelle un bras passera et sans un mot, sans vraiment trop de regards, elle boutonne l'épais manteau, les yeux tristes, le visage crispé. Car après tout, cette petite aparté, la situation n'était-elle pas toujours la même ? Amelia devait partir, laisser ce petit cocon derrière elle et reprendre le cour de sa vie brisée, sans quoi, elle finirait par devenir folle, commettre l'irréparable de peur que quelqu'un d'autre ravisse sa place dans le coeur trop grand du doc. Et irrémédiablement, ses yeux se figent sur la pointe de ses chaussures alors qu'elle avance, les yeux mornes, l'allure fière reléguée loin derrière elle. Si bien d'ailleurs qu'elle n'entend pas vraiment les remerciements à la pelle, se contentant de lever le nez au dernier, forçant un maigre sourire faux, si faux qu'il en est presque ridicule avant qu'elle ne prononce, la mort dans l'âme. « Y a pas de quoi, j'allais pas te laisser par terre, là bas. » Là bas, chez lui, chez elle, chez eux ? Non, tout ça n'existait pas, elle ne s'était fait que de faux espoirs en imaginant qu'elle seule pourrait remplir l'espace, remplir son coeur au point de lui en faire oublier tout le reste. Amelia ne suffirait pas et elle le savait déjà.

Feat Eos

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Tout était si morose. Malgré les couleurs enchanteresses qui couvraient maintenant la ville, faisant scintiller la blancheur cristalline de la neige de quelques rayons mordorés, Amelia restait morose. Silencieuse, murée dans ce silence mortifère, elle n'arrivait plus à prononcer le moindre mot, sentant simplement le poids de toute cette conversation revenir lui peser sur les épaules, comme sonnant le glas de cette relation. Pourtant, quand Eos demande qu'elle l'habille, elle agit sans réfléchir, nouant un à un les boutons de l'épais manteau jusqu'à ce que le doc et son bras en écharpe soient entièrement couverts. La remarque concernant sa propre tenue vestimentaire lui fait un instant lever les yeux et comme si les paroles la frappaient à retardement tant elle était engluée dans ses pensées, la vampyre acquiesce, enfilant le pull par dessus sa chemise sèche, y retrouvant l'odeur de chez soi qu'avait les vêtements d'Eos.

Alors elle avance, en silence, le bruit de ses bottes sur la neige crissant dans ce bruit typiquement étouffé et quand le bras du doc se passe sous le sien, Amelia se raidit. Tendue, crispée, les larmes montent lorsqu'Eos prononce ces trois mots, laissant une Amelia toujours plus silencieuse, la mort dans l'âme d'entendre ces mots qui ne signifiaient rien d'autre que tout ce qu'elle n'aurait jamais. Elle avait connu l'amour, une seule fois, pour qu'il lui soit retiré à peine avait-il été avoué. Quelle douloureuse réalisation. Comme si finalement la vampyre n'avait pas le droit au bonheur, voilà qu'on lui étalait une fois encore cette douloureuse réalité au visage et le bras simplement là, enlacé à celui d'Eos, Amelia avance en silence, voyant les ibouris s'envoler direction le pallier.

À la proposition de boisson chaude, la jeune femme hoche simplement la tête, avançant maintenant jusqu'à la porte qu'elle ouvre, laissant passer les Ibouris et le doc devant elle tandis qu'elle revoit certainement les flashs de cette chute défiler devant ses yeux maintenant qu'elle voit l'entrée. Las, morne, morose au possible, elle hoche de nouveau la tête, ponctuant simplement ce mutisme d'un simple « D'accord » lorsqu'Eos propose qu'ils parlent, encore. Mais Amelia s'imaginant sûrement déjà que l'issue de la conversation serait douloureusement similaire, elle se contente de refermer la porte derrière eux, restant un instant plantée dans l'entrée, se demandant sûrement pourquoi elle était de retour, pourquoi ils devaient de nouveau s'infliger de se briser le coeur.

Alors elle s'avance, vers cette cuisine vidée de sa table, cherchant sûrement des yeux la bouilloire à placer sur le fourneaux, elle qui ne mangeait rien d'autre que du sang depuis deux années. Et comme un robot, dans une langueur mortelle et presque douloureuse à regarder, la vampyre s'active, remplissant la bouilloire d'eau qu'elle met sur le fourneau, cherchant sûrement du regard du thé ou quelqu'autre connerie à faire infuser dans l'eau chaude.

Feat Eos

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La petite aparté n'avait rien enlevé à cette impression douloureuse que provoquait la vision d'Eos à une Amelia toujours aussi ravagée. Oui, elle était restée, l'avait aidé, mais tout le reste du temps, la vampyre avait surtout agonisé, subissant le regard plein de jugement du Lafleur qui ne s'était pas gêné. Infusant sa honte et son malaise dans l'esprit tourmenté d'Amelia, elle n'en était que plus encore acculée et poussée à fuir loin de cette douleur. Alors toujours hébétée, perdue, seule, Amelia s'était contentée de suivre, hochant mollement la tête aux propositions d'un Eos décidé à de nouveau s'expliquer.
Une fois la porte ouverte, la vampyre ne sait plus quoi faire, devait-elle fuir, reprendre ses affaires et s'en aller ? Sûrement, peut-être, mais elle se laisse encore guider et c'est dans la cuisine qu'elle s'affaire à mettre de l'eau à chauffer, opinant simplement à chaque nouvelle suggestion d'Eos qu'elle n'a pas la force de contester. Une boisson chaude ? Comme si un pisse mémé pouvait réparer le gouffre béant dans sa poitrine. Et prise dans son tourment personnel, Amelia ne dit toujours rien, tournant simplement un regard las vers Eos lorsqu'il l'interpèle.

Apparemment, lorsqu'elle avançait vers la cuisine, Eos s'est rendu au bureau pour lui donner son traîtement spécial petite tarée du coin et regardant sans intérêt la poudre, la vampyre détourne les yeux pour se concentrer sur sa besogne, faire chauffer de l'eau dans ce machin qui va sur le fourneau. Et en silence, elle écoute. Les paroles hésitante d'un Eos sûrement aussi paumé qu'elle, ses tentatives d'explications au sujet du fonctionnement de son palpitant et malgré son mutisme et sa langueur, Amelia se tend lorsqu'il mentionne être capable de n'aimer qu'elle. Alors elle cesse ses gestes et regarde un instant dans sa direction, les yeux tristes, si tristes d'y avoir cru comme une idiote et elle demande, sûrement un peu trop sèchement : « Et comment tu peux en être sûr ? Ça se contrôle pas ces choses là, qu'est-ce qui me dit que tu tomberas pas pour la première fleuriste ou une potiche à cornes qui te fera des sourires ? » Les mots sont tranchants, coupants comme ses canines qu'elle ne dévoile pas tant tout sourire semble avoir quitté la face de l'héritière. Elle est malheureuse, à nouveau et malgré l'influence de la poudre, son moral qui avait nettement amélioré, Amelia se dit sûrement qu'elle serait finalement peut-être mieux morte, loin de ces us qu'elle ne comprenait pas, de ces relations humaines si difficiles, si compliquées. Peut-être aurait-elle simplement dû mourir, ce funeste jour où sa famille avait été éliminée, c'était l'ordre naturel des choses. Mais elle ne parvient plus à soutenir son regard lorsqu'il demande si elle l'aime encore, le coeur sûrement à nouveau piétiné, les yeux qui se gorgent de larmes. Car Amelia n'a pas la force de répondre, ni plus qu'elle ne recule sa main au contact des doigts contre, alors tournant ses rubis vers Eos, dont elle darde le regard, la vampyre se tait, ses yeux parlant sûrement pour elle, elle qui n'avait de toute façon jamais su quoi dire.

Feat Eos

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Comment aurait-elle pu oublier toute cette peine si rapidement ? L'enfer, c'était les autres après tout. Et si Amelia avait bien compris quelque chose pendant ces deux années, c'était qu'il valait mieux rester seule plutôt que de souffrir. Alors les yeux perdus dans le vague, elle écoute, attend les mots qui lui feraient oublier sa peine, ceux qui effaceraient les deux dernières heures d'un claquement de doigts. Mais ces mots là n'existent pas, car rien ne saurait effacer la douleur qu'elle avait ressenti lorsqu'elle avait compris qu'elle ne serait jamais assez. Et la balle part, première réaction acerbe qu'elle lance comme une question qui n'en est pas une. Car si finalement Amelia demande, n'a-t-elle pas déjà fait son choix ? Après tout, c'était simple, le coeur d'Eos était trop grand face au sien si petit, elle n'en aimait qu'un et lui pouvait aimer tous les autres avec.

Et toujours hagarde et lasse, elle écoute la réponse qui se fait avec une main qui remonte jusqu'à son coude, fronçant déjà les sourcils. Oui, un jour, peut-être, Eos ressentirait des choses pour quelqu'un d'autre. Les mâchoires de la vampyre se serrent immédiatement, la fureur montant déjà en elle. Mais Eos promet, que jamais il ne s'autoriserait à aimer quelqu'un d'autre et un instant, Amelia le suit du regard. Elle qui avait mis tant d'années à s'ouvrir, avait fini par le fait avec le coeur d'artichaut le plus facile à émouvoir de la ville. Comment pourrait-elle rivaliser ? Alors que des centaines d'âmes la surpassaient en tout point. Elle la colérique, mauvaise, agressive vampyre. Et si ses lèvres ne disent rien, son esprit tourne à toute bringue, faisant déferler les situations catastrophes, défilant un à un les scénarios douloureux dans l'imagination d'Amelia qui se voit déjà le coeur brisé, en miettes, plus qu'il ne l'est déjà.

Alors à la question, elle hausse tristement les épaules, les yeux toujours vides, le coeur toujours béant dans sa poitrine. Car aucune promesse ne saurait effacer sa jalousie maladive, cette peur viscérale qu'elle avait d'aimer. C'était si effrayant ce sentiment nouveau, cette crainte de voir l'autre lui être arraché. Amelia détestait ce sentiment, c'était tout bonnement insupportable. Mais à la dernière question, elle hoche la tête, bonne petite vampyre gentille qu'elle était, brave patiente, elle goberait ses cachets. Car il l'avait sauvée après tout, alors elle lui devait bien ça non, de rester en vie ? La main qui quitte donc son épaule laisse comme un froid et plantée devant le fourneau, Amelia regarde le doc saisir des tasses, grimaçant lorsque son incapacité nouvelle le rappelle à l'ordre concernant son bras bandé. Plantée là, comme un navet, la vampyre semble hésiter, comme si quelque chose au fond d'elle l'attirait vers Eos, vers ses bras, vers le réconfort qu'elle y avait toujours trouvé. Mais les barrières étant revenues s'ériger, elle ne sait plus quoi faire, comme si finalement, il avait suffit d'un peu de douleur pour calmer son impulsivité. Car finalement, ne rendait-elle pas service à Eos en partant ? Il avait sûrement bien mieux à faire que de s'occuper d'une vampyre suicidaire et ses idées trop arrêtées. Son manque de confiance et sa peur de s'ouvrir ne seraient qu'un frein à la jolie petite vie que le doc s'était fabriqué. Il méritait mieux, à n'en pas douter. Alors elle reste là, silencieuse, les yeux rivés sur les gestes du doc qui prépare sa petite mixture à sa dépressive de compagnie, les bras ballant, le coeur gros, comme si la chaleur du fourneau ne parviendrait jamais à la réchauffer.

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Comme tous les gosses pourris gâtés, Amelia imaginait sûrement que les paroles d'Eos auraient pu parfaitement réparer son coeur, lui faire oublier la peine qu'ils s'étaient infligés jusqu'alors et vivre le parfait amour sous le toit de cette charmante bâtisse. Et même si le doc avait promis des choses, assurant qu'elle était et resterait la seule, le pessimisme d'Amelia l'empêche d'entendre, de comprendre que dans un monde ou certains pouvaient aimer plusieurs, ils pouvaient aussi choisir de n'aimer qu'elle. Alors le temps passe, les secondes s'égrainent et la vampyre ne dit plus rien. Les yeux pleins de larmes, elle pense. Réfléchit comme elle ne l'a jamais fait, turbine à toute bringue dans l'espoir d'imprégner les paroles prononcées. Et quand elle regarde Eos s'affairer, préparer les deux tisanes pour malade, Amelia semble sur le point de s'effondrer.

Elle aurait voulu tout ravager, hurler sa haine, son dédain des autres. Ces autres, ceux qui pouvaient lui voler celui qu'elle aimait. Et s'enfonçant toujours plus dans la noirceur, c'est la voix d'Eos qui la coupe dans ses scénarios, les mâchoires serrées d'une colère qu'elle avait provoqué. Qu'est-ce qu'elle attendait de lui, maintenant ? Maintenant qu'il avait promis, avait joué cartes sur table. Elle même l'ignorait. Et sourcils froncés comme elle le faisait lorsqu'elle se sentait perdre pieds, elle soupire, le coeur serré : « Je... J'en sais rien. » Mais son regard ne parvient plus à se détacher de la silhouette d'Eos, qui prépare leurs thés le coeur gros, sûrement aussi gros qu'elle.

Alors mue par cette impulsivité qu'elle pensait éteinte à jamais, Amelia s'approche, ses doigts venant chercher ceux d'Eos une fois sa besogne terminée. Elle aurait dû partir, s'enfuir, rester loin de lui et de son coeur trop gros, mais elle n'arrivait pas à s'y résigner. Et mordillant l'intérieur de sa lèvre inférieure, la vampyre hésite, reformule certainement une centaine de fois les paroles qu'elle veut dire dans son esprit, avant qu'une litanie sans queue ni tête ne se lance. « Je sais que tu as promis, mais si jamais un jour... » Les mots meurent dans sa gorge un instant et elle chasse les larmes de ses yeux rougeoyant, grimaçant légèrement devant cet élan de faiblesse. « T'as pas intérêt à me faire ça, t'as compris ? » Et elle vient cette fois se planter devant Eos, ses yeux renvoyant un mélange incompréhensible de milliers d'émotions. Sa main libre monte alors vers le coeur du doc et s'y appose et elle plante alors un regard teinté de toute la violence dont elle était capable avant qu'elle ne serre faiblement ses doigts contre le manteau qu'ils n'avaient même pas pris le temps de retirer. « Il est à moi. » Son coeur, lui tout entier. En acceptant ses conditions, Eos se mettait très certainement en danger, mais choisir d'aimer un monstre n'était-ce pas déjà un signe évident de folie ? Et sûrement qu'une larme ou deux lui échappe, mais l'idée de se cacher n'était plus d'actualité, elle voulait qu'il voit, comme elle l'aimait, comme il avait le pouvoir de la détruire.

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Décembre 10, 118

Eos devait certainement être fou. Fou d'accepter de partager sa vie avec une femme colérique, violente, jalouse. Mais le coeur était bordé de mystères et dans cet étrange amour qui s'était tissé entre eux, la raison avait depuis bien longtemps abandonné le navire. Alors peu à peu, l'hébétude laisse place à autre chose, une réalisation concernant le fait que malgré toute la peur, la jalousie qu'elle ressentait à l'idée que quelqu'un vienne lui voler celui qu'elle aimait, Amelia ne pouvait rester loin de lui plus longtemps. Et peut-être finiraient-ils par regretter ce contrat, peut-être aurait-elle dû partir, mais quand enfin elle s'approche et profère quelques menaces sous forme de suppliques — ou l'inverse —, Amelia attend, qu'il accepte, refuse, la repousse et la chasse finalement de chez lui.

Mais rien ne vient dans ce sens. Même la grimace provoquée par les doigts serrés contre le manteau ne font pas reculer le doc qui plonge maintenant son regard dans celui de la vampyre. Il était à elle. Tout entier. Son palpitant trop gros qu'il acceptait de museler avec et sondant un instant le regard d'Eos, Amelia y cherche la moindre trace de mensonge, d'hésitation. Mais elle n'y voit rien d'autre que cet amour stupide, celui qui lui faisait oublier tous les danger que représentait le fait de se lier à un monstre. Et un sourire léger tordant le coin de ses lèvres carminées lorsqu'Eos la gratifie de ces trois mots, Amelia s'avance, d'autres larmes venant mouiller les doigts qui tiennent sa mâchoire en coupe et sa main remontant près de la nuque qu'elle attire près d'elle, la vampyre tente de se faire douce malgré le flot d'émotion qui la traverse, murmurant tout près des lèvres convoitées. « Je t'aime. »
Et elle l'embrasse, avec douceur tout d'abord, mais bien vite, l'avidité la prend et fronçant les sourcils lorsqu'elle réalise qu'elle ne pouvait se laisser aller, ses doigts se font plus léger contre la nuque qu'elle tenait, son visage reculant finalement tandis qu'elle le toise d'un regard brûlant. Amelia devenait raisonnable ? Non, c'était tout bonnement impossible. Prenant alors la tasse fumante dans laquelle l'anti douleur avait été versé, elle la tend à Eos, les yeux remplis des milliers d'idées venues fourmiller à son simple contact et prenant finalement la sienne, elle souffle dessus sans le quitter du regard, bien décidée à boire sa tisane spéciale cinglée avant d'entraîner le doc blessé à l'étage, où ils s'expliqueraient dans le langage qu'ils maîtrisaient le mieux : celui que leurs corps parlaient.

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Décembre 10, 118

On aurait pu s'épancher des heures durant sur les expériences de vie de la vampyre, nommer les nombreuses personnes bienveillantes que sa vie passée avait connue, raconter la larme à l'oeil comme son enfance avait été heureuse et bordée de leçons toutes plus réjouissantes et adorables les unes que les autres. Oui mais voilà. Amelia n'avait jamais été choyée dans une famille heureuse. Tout au plus, les leçons que son père lui apprenaient consistaient à identifier les points de faiblesses d'un adversaire, comment bien pulvériser des rotules, ce genre de joyeusetés...

Alors, nageant dans un monde dont elle ignore tout, perdue de découvrir ces sentiments nouveaux que ses parents auraient certainement répudiés, Amelia s'abandonne. Elle s'abandonne à cette douceur, cette tendresse, cette promesse folle que le doc lui faisait. Car le fou savait avec quelle genre de diablesse il frayait, après tout, elle avait été sa patiente et l'était encore probablement un peu, en témoignait la poudre anti dépressive versée dans la tasse fumante préparée. Mais pour l'heure, Amelia ne pense plus à rien, rien d'autre que cette odeur, ce coeur qu'elle sent battre pour elle sous l'enchevêtrement de vêtements enfilés. Et si elle aurait bien pu tout oublier, se perdre contre les lèvres qu'elle embrasse, effleure, attise des siennes, c'est le murmure d'Eos contre sa bouche qui la fait se reculer. Immédiatement, la surprise colore ses traits et pinçant ses lèvres elle lâche la veste qu'elle tenait bien plus fort qu'elle n'aurait voulu le faire. Cette force était un atout, à l'extérieur, mais là, dans cette bâtisse, contre celui qu'elle aimait, elle devrait apprendre à la maîtriser.

À la demande, un sourire mutin remplace la grimace de surprise navrée et hochant la tête, elle ronronne presque à mesure que les boutons du manteau sautent, ses doigts s'infiltrant déjà sous l'épais tissu. Mais toute à sa contenance, elle se retient et se contente de faire glisser le manteau, le posant finalement sagement sur le dossier d'une chaise non loin. Arrêtée dans ses idées grivoises par l'enlevage en règle de la pelure et des thés pour estropiés, Amelia se fait sage, posant à son tour sa tempe contre l'épaule d'Eos qu'elle enlace d'un bras, son nez venant parfois effleurer la peau tendre de la gorge tout près, quand elle est tirée de ses rêveries apaisantes par la voix du doc qui se fait de nouveau entendre. Le temps ? C'est vrai que ce paramètre lui avait complètement échappé... Elle qui se soignait à grand coup de potions magiques hors de prix depuis qu'elle était arrivée. Elle pince alors un instant ses lèvres avant de hausser les épaules de cette même désinvolture : « Peu importe combien de temps ça prend... » Et un petit sourire lui vient en réponse aux précision qu'apporte Eos, alors qu'elle s'approche déjà pour l'attiser. « Je suis prête... À tout faire. Absolument... tout. » Et la bougresse a même l'outrecuidance de laisser un instant ses incisives effleurer la peau de la gorge qu'elle sent se tendre contre elle, une main câline glissant contre les reins d'Eos qu'elle effleure, griffe avec douceur dans un geste d'une évidence certaine. Elle glousse, quand la réalisation vient aux neurones d'Eos et posant sa tasse vide sur le rebord de l'évier, Amelia se recule, attrapant la main d'Eos qu'elle entraîne avec elle dans les escaliers. Grouik et Psyché sont toujours aussi perturbés, mais suivant simplement leurs maîtres et maîtresses, ils s'installent côte à côte sur le canapé, se pelotonnant déjà l'un contre l'autre alors qu'Amelia pousse délicatement Eos droit vers le sommier, l'aidant à s'y allonger tandis qu'elle lui grimpe dessus, féline, directrice au possible dans cette manière qu'elle avait de prendre les devant sans vraiment se demander si ses gestes seraient mal intérprétés. Après tout, Eos avait accepté, non ?

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Décembre 10, 118

Tout était déjà oublié ? Non, certainement pas. Mais Amelia n'ayant pas la capacité de réflexion d'une érudite, elle faisait ce qu'elle faisait de mieux : enterrer toute pensée, laisser son corps parler ce langage que sa bouche refusait de formuler. Et si l'heure est d'abord à la sagesse, c'est assez rapidement que les idées de la vampyre s'envolent, loin, si loin de cette réalité grise dans laquelle elle avait failli s'en aller sans se retourner. Même l'idée de devenir le soutien d'Eos ne semble pas perturber les pensées grivoises qui éclairent maintenant le regard de la vampyre, tant et si bien qu'elle profite de retirer le manteau pour glisser quelques caresses, les yeux rivés dans ceux du doc qu'elle dévore du regard.

Pour toute réponse, la bougresse sourit, laissant le manteau là, quelque part dans cette cuisine toujours vidée de sa table. Table qu'elle devrait certainement remplacer, un jour, quand elle parviendrait à se détacher de cette étreinte, de cette odeur capiteuse qui l'attire dès lors qu'un courant d'air porte à ses narines de prédateur la senteur aimée. Abandonnée est la cuisine, au profit d'une montée d'escaliers en douceur, préférant la prudence à la précipitation qu'avait vu le matin. Non, les idées de la vampyre sont toute autres et une fois la porte de la chambre refermée, elle tire Eos près d'elle, vers ce lit qui les déjà tant vu s'étendre. Mais avant même qu'elle ne l'ai étendu sur les draps, Amelia est coupée dans son élan par les paroles que le doc prononce et un sourire venant déformer sa bouche, elle cesse son geste, arrimant sa nuque d'une main douce, pour venir voler ses lèvres. « Moi aussi... Je t'aime. » Et comme si les mots ne suffiraient jamais assez, elle l'embrasse, avec toute la douceur dont elle dispose, tout cet amour qui lui brûle la poitrine, lui humidifie les yeux. Son corps tout entier brûle pour lui et faute de verbe suffisamment développé, elle le pousse avec douceur contre ce sommier, le laissant s'asseoir, puis s'étendre avant de venir l'enfourcher.

Assise fièrement sur ses reins, la vampyre sourit, à s'en tirer les joues, heureuse, si heureuse qu'elle pourrait hurler, exulter cette joie qu'elle sent la transcender. Mais à défaut de pouvoir s'exprimer, les doigts taquins se faufilent, remontant déjà le pull si rapidement enfilé, trouvant celui que Lafleur avait découpé et ronronnant déjà contre les lèvres qu'elle ne fait qu'effleurer, la question lui tire un sourire victorieux. « Toi, tu ne fais rien... Moi par contre... » Et la bougresse illustre ses gestes en laissant ses lèvres dévier, venant effleurer la gorge qu'elle sent frémir contre sa bouche rieuse. Au dessus d'Eos, la panthère se meut avec souplesse, retenant ses canines d'arrimer la peau qu'elle attise. La garce n'a aucune idée de ce qu'elle fait, mais elle essaie, laissant ses lèvres glisser contre la gorge qui palpite pour elle, laissant ses gestes la guider plus bas, toujours plus bas. Le pull n'est même pas retiré, faute de savoir comment faire sans blesser davantage le doc mais arrivée à mi chemin, elle en remonte les pans, découvrant le ventre contracté d'une attente délicieuse. Les yeux rivés dans les sien, Amelia sourit, hésitante tout autant qu'elle est sûre et ses doigts glissant contre les hanches qu'elle sent frémir, ses doigts s'affairent à déboucler la ceinture, abaissant déjà le pantalon qui tombe aussi rapidement qu'il avait été enfilé.

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Décembre 10, 118

Un jour il faudrait vivre, manger, boire, dormir aussi peut-être pour Eos. Mais pour l'heure, galvanisés par leurs petits coeurs réchauffés à l'idée de ne pas se perdre, plus rien n'existe d'autre qu'eux, que cette chambre, refuge de toujours qui les avait vu s'enlacer, lier leurs coeurs à tout jamais. Car si Amelia savait certainement qu'elle ne lâcherait jamais le doc, lui devait certainement imaginer que l'amour vampyrique était fébrile, changeant comme sa propriétaire. Mais non, maintenant la zipette au cou, Eos était empêtré plus que jamais.

Mais il se laisse guider sans broncher, par une Amelia directive qui prend très au sérieux son petit rôle de garde malade. Bien décidé à donner un peu de baume au coeur à son patient, elle l'invite à s'allonger, après quelques baisers et roucoulements de rigueur, la lueur de malice dans ses yeux parlant pour elle. Le dîner était servi et Eos serait le plat principal.
Alors la fière cavalière laisse sa place de choix, restant sage toute vêtue qu'elle est. Et c'est plus bas, vers l'objet de ses convoitises que ses baisers la mènent. Le pull est retroussé, laissé à sa position qui enserre l'épaule blessée et laissant ses lèvres déposer marque de twill contre les méplats du torse qu'elle attise, sa bouche descend encore et encore, dardant de frissons chaque centimètres qu'elle attise.

Feat Eos

Décembre 10, 118

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